Reportage Afrique

Centrafrique: le fléau de la prostitution chez les jeunes filles mineures [3/3]

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En Centrafrique, la prostitution est considérée comme un sujet tabou. Mais de plus en plus de jeunes filles, dont l’âge varie de 12 à 16 ans, la choisissent comme moyen de subsistance. Orphelines pour la plupart, elles ont perdu leurs parents pendant les crises militaro-politiques qui ont secoué le pays et se retrouvent sans repères. Reportage dans la capitale.

Une prostituée est allongée dans son lit après avoir servi un client (image d'illustration).
Une prostituée est allongée dans son lit après avoir servi un client (image d'illustration). ASSOCIATED PRESS - Alexandre Meneghini
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De notre correspondant à Bangui,

La nuit tombe sur Tiringoul. Situé dans le 5e arrondissement de Bangui, ce croisement abrite de nombreux kiosques, buvettes et maquis à forte fréquentation. C’est aussi l’un des endroits de la capitale où la prostitution est particulièrement développée. Peu après 20h, une vingtaine de jeunes filles âgées de 12 à 16 ans envahissent les lieux. Vêtues de robes très courtes, on les voit au bord de la route et à l’entrée de maisons inachevées.

Bouteille de whisky dans la main droite, cigarette dans l’autre, Achetou, 14 ans, est en quête de potentiels clients. « Ça fait six ans que j’ai perdu mes parents dans la crise et il n’y avait personne pour s’occuper de moi. La prostitution est devenue mon gagne-pain. Pendant les fêtes, je peux coucher avec sept hommes. Ce que je gagne varie entre 15 000 et 40 000 FCFA (environ 61 euros) en une seule journée », explique-t-elle. 

Presque toutes ces jeunes filles ont des histoires similaires, et sont persuadées que c’est le seul moyen pour elles de retrouver une place au sein de la société. Mais elles s’exposent aux maladies sexuellement transmissibles. Gisèle, 13 ans, a été testée séropositive en 2021. « Actuellement, je dors chez une amie. Après la mort de mon père, ma mère s’est remariée, mais son nouveau mari me déteste, sans raison. Il me traitait de sorcière, me frappait et me maltraitait tous les jours. J’ai décidé de m’enfuir. Et pour survivre, je dois vendre mon sexe », confie-t-elle.    

Tenter de « changer la mentalité de ces jeunes filles »

Le taux de VIH-Sida chez les jeunes est de 30%, selon une étude de l’Association centrafricaine de marketing social (Acams). Pour lutter contre le fléau de la prostitution, l'association Soleil de Centrafrique propose des activités génératrices de revenus à ces filles.

« Nous souhaitons vraiment les encourager à quitter le milieu dans lequel elles se trouvent et de les ramener à la raison, explique Epiphanie Nambozouina, coordonnatrice de l'Acams. Nous souhaitons les accompagner et les intégrer dans les activités génératrices de revenus qu'on va leur proposer. Par exemple, fabriquer des sacs avec des perles, faire de l'hôtellerie, faire de la couture, tout cela selon la vocation de la fille en question. Mais le plus important, c'est de changer la mentalité de ces jeunes filles. » 

Même si la loi centrafricaine assimile la prostitution des mineurs à la pédophilie, il est difficile de mettre la main sur les clients afin de les traduire en justice.

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