RDC: la route des esclaves de Kamelie, une histoire congolaise à faire connaître
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Quand on évoque « les routes des esclaves » en RDC, on pense principalement au réseau nord qui partait de Kinshasa vers l'Angola en passant par le Congo central et le port de Moanda. Pourtant, il y a un autre réseau, celui du sud est utilisé essentiellement fin XVIIIe et début XIXe siècle par les Arabes, dont Mohamed Ahmed, connu sous le nom de Tipo Tip. Ses captifs, qui provenaient de la région du Maniema et des environs de Kalemie au sud est de la RDC, étaient ensuite exposés pour la vente au village Kasenga, à plus de 30 km, avant d'être embarqués vers l'île de Zanzibar en Tanzanie. Aujourd'hui, le Musée national à Kalemie tente de faire resurgir cette partie de l'histoire congolaise oubliée.

Les Routes des esclaves est un site perdu entre des collines à près de 500 mètres du rivage du lac Tanganyika au nord de Kalemie, en RDC. Pour l’atteindre, il faut passer par le village Kasenga construit sur du sable fin de la plage. Portace Sungura, âgé de 79 ans, a vécu dans cette bourgade toute sa vie et raconte : « Ici était le marché des esclaves. Ils venaient de partout, et puis ils étaient embarqués vers d’autres pays. C’était le commerce des blancs et nous Congolais, on était vendu comme de la marchandise. »
Le lieu qui servait justement de marché des esclaves est à environ 400 mètres. Ici, 22 manguiers vieux de plus d'un siècle forment deux rangées. La bande de Tipo Tip utilisait ces arbres pour attacher les esclaves avant l’échange. Mais, cet espace chargé d’histoire ne porte aucune inscription, regrette Kaskile, notre guide : « Ces arbres ne sont plus au nombre complet. Il y a celui-là qui est à côté, des jeunes l’avaient abattu pour produire du charbon. Et ce cet autre manguier du milieu, on l’avait coupé et déterré, espérant y trouver de l’or, mais il n’y avait rien… Et tout ça, c'est parce qu’il n’y a pas de plaque qui identifie le lieu. »
La rivière Rugo sépare le site du village. Robert Sulubika, un jeune d’une vingtaine d’années, assure la traversée en pirogue des quelques rares visiteurs. « Les marchands d’esclaves passaient par cette voie. À l’époque, il n’y avait pas d’eau. Ils les conduisaient vers cette plage du lac Tanganyika qui est juste à côté, ensuite, ils les embarquaient pour la Tanzanie », explique-t-il.
La Tanzanie, où vivent aujourd’hui les descendants de Naebeka, le grand-père d'Hubert Mbangwanguma, âgé de 89 ans, que nous avons rencontré un peu plus loin du site. Naeba était fait esclave par le groupe de Tipo Tip alors que la traite était déjà abolie, se souvient même en chanson son petit-fils Hubert : « Mon grand-père a été capturé et il est parti. Mais, il avait réussi à s’en fuir, car à ce moment-là, les Belges faisaient pression sur les Arabes. Et mon grand-père s’est installé à Iragana (en Tanzanie) où il est enterré. »
Le site La Route des esclaves, au nord de Kalemie, est à ce jour menacé par les inondations. Certains manguiers ont séché. Le Musée national, antenne de Kalemie quant à lui, mène une campagne de promotion de cet espace afin de mobiliser des ressources pour le protéger.
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