Centrafrique: ils pêchent le sable de l'Oubangui au péril de leur vie pour nourrir leur famille
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L'extraction de sable est devenue une activité à grande échelle pour de nombreux riverains. Des jeunes désœuvrés, des étudiants et même des élèves poussés par la pauvreté pratiquent ce travail pour gagner de l’argent. On les appelle les « pêcheurs de sable ». Mais en cette saison pluvieuse, la crue de la rivière Oubangui rend difficile cette activité. Conséquences : les cas de noyade sont fréquents et le sable devient de plus en plus rare face aux demandes d’un secteur immobilier en pleine expansion à Bangui.

De notre correspondant à Bangui,
Dans cette pirogue de douze mètres de long et un mètre de large, une équipe de trois pêcheurs de sable se dirige au milieu de la rivière Oubangui. Contrairement aux pêcheurs traditionnels, ils n'ont pas de filets, mais des seaux, des pelles et des cordes. Pagaie en main, Oscar, jeune piroguier de 12 ans, essaie de contourner les vagues et les courants d'eau. « L'eau est très agitée pendant cette saison pluvieuse. Beaucoup attendent la saison sèche pour revenir, mais comme nous sommes des guerriers, on n'a pas le choix. »
Après 10 minutes de voyage, nous arrivons enfin dans la zone d'extraction du sable. Vêtu de culotte noire, torse nu, Arnaud saute dans l'eau sans perdre une seconde. Deux minutes plus tard, le jeune de 28 ans remonte à la surface avec son seau rempli de sable. « En tant que pécheur de sable, ma mission consiste à faire des plongées à trois mètres de profondeur. Une fois au fond, je remplis le seau avec le sable. Ensuite, je secoue la corde comme un signal pour permettre à mon coéquipier qui est dans la pirogue de remonter le seau par la force de ses bras. »
Conséquences multiples sur la santé
Dans ces eaux troubles de l'Oubangui, les pêcheurs de sable effectuent une centaine de plongées chaque jour. C'est un travail pénible avec beaucoup de conséquences, selon Alphonse, l'un d'eux : « On a trop de soucis. À force de pratiquer ce métier, certains d'entre nous ont des problèmes de vue, d'autres des problèmes d'audition. Chaque soir, j'ai des maux de tête et des problèmes respiratoires. On n’y peut rien, car c'est notre seul moyen de vivre. »
Une fois la pirogue remplie, l’équipe revient pour à la berge pour stocker le sable. Ici, 20 tonnes de sable coûtent 50 000 CFA, soit 77 euros. Cet argent est partagé entre les piroguiers, les plongeurs et remonteurs et les chargeurs de camions. Arnaud gagne chaque jour 15 000 francs CFA, l’équivalent de 24 euros. « On travaille entre 8 heures et 17 heures, personne n’a de gilet de sauvetage, ni de bouteille d’oxygène, explique le plongeur. C’est difficile de trouver du travail et c’est pour cela que l’on se concentre quand même sur cette activité pour s’occuper de nos familles. »
Ces sables servent à construire des immeubles, des maisons et des routes. Mais l'augmentation du niveau de la rivière Oubangui provoque aujourd'hui la rareté et la hausse des prix du sable à Bangui.
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