«Bandiagara», l'exposition d'art africain aux dimensions monumentales d'une ancienne gare
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Direction le sud de la France, dans le Lubéron. Cigales, champs de lavande et art africain… La fondation Blachère célèbre ses 20 ans d’existence avec une exposition intitulée Bandiagara, au commencement de la collection. Immersion.

Dans l’ancienne gare de Bonnieux, c’est un pachyderme grandeur nature qui accueille le visiteur. Sculpture monumentale du Sud-Africain Andries Botha, « [L’éléphant blessé] est l’une des pièces phares de l’exposition, sélectionnée sur le volet parmi les 2 300 que compte la collection de Jean-Paul Blachère. »
C’est en 2001, face aux falaises de Bandiagara, au Mali, que cet industriel s’est pris de passion pour le continent africain, qui s'émerveille encore de son premier souvenir : « Dès qu'on arrive sur Bandiagara, sur les falaises, on est subjugués. D'abord, Marcel Griaule a beaucoup écrit là-dessus, avec tous ces petits champs d'oignons, avec de l'eau de récupération, on sent que tout est précis. C'était fabuleux. De ces falaises, on sent qu'on est plus que poussière par rapport à l'immensité et la beauté des lieux... On dirait presque que le monde s'est créé à cet endroit. »
Un lieu atypique
Les espaces immenses de la gare de Bonnieux ne sont pas de trop pour accueillir des pièces souvent monumentales. C’est le cas de La zone des grands Lacs, du Malien Abdoulaye Konaté, une tapisserie de quatre mètres de haut et quatorze de long. Ou encore de l’impressionnant Lanceur zoulou d’Ousmane Sow.
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La Franco-Sénégalaise Diagne Chanel, elle, occupe toute l’esplanade du bâtiment, avec quatre gisantes en bronze, hommage aux femmes victimes du conflit soudanais. Elle se félicite d'être exposée dans ce lieu atypique : « Il y a des périodes où j'exposais tout le temps dans des musées, mais je n'étais pas achetée par les musées... Donc qu'est-ce qui m'a permis de survivre ? Ce sont les achats des privés. Les privés sont des personnes qui permettent à ce qu'une partie de l'histoire de l'art, une partie des auteurs, aussi, ne disparaisse pas. »
Dénoncer l'esclavagisme en montrant les corps
Diagne Chanel construit depuis une vingtaine d’années une œuvre qui évolue au fil de ses voyages et de ses engagements. À la fondation Blachère, elle expose aussi Fruits étranges pour John Garang. « Sur le Soudan, sur la Mauritanie, sur le lynchage des Noirs américains, c'était pour dénoncer ce que j'appelle un mensonge qui dirait que l'esclavage serait terminé, ce qui n'est pas la réalité, explique l'artiste. Il y avait, à la fois, une invisibilité sur la réalité de cet esclavage et sur la représentation des Noirs dans la sculpture, la peinture, etc. Maintenant, cela a changé, je les représente beaucoup moins... Mais c'est vrai qu'une grande partie de mes œuvres ont rendu hommage à ce que j'appelle le corps noir. »
Des corps noirs qui résonnent avec ceux, en bois d’ébène, du Malien Amahiguéré Dolo, disparu en 2022. Longues jambes émaciées, bras dressés implorant le ciel – pour que la pluie féconde la terre. Grâce à lui, c’est toute la cosmogonie dogon qui s’installe sous le soleil provençal.
► Bandiagara, au commencement de la collection, jusqu’au 21 septembre, à la fondation Blachère, à Bonnieux.
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