Reportage France

Jeunesse antillaise: comment freiner l'exode économique ?

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Après les troubles aux Antilles en fin d'année dernière, comment répondre au désarroi économique de la jeunesse qui en est en partie à l'origine ? Voilà plus d'un mois que l'État français a lancé des concertations avec les syndicats, et les collectivités locales en Martinique et en Guadeloupe sur les moyens d'améliorer l'emploi et la formation locale des jeunes. Des jeunes souvent tentés de baisser les bras ou de partir, faute de perspectives. L'enjeu est d'autant plus crucial que la population des deux territoires vieillit du fait de l'exode de cette jeunesse.

Les Antilles font face à un exode de sa jeunesse, à cause du manque d'opportunités en Martinique et en Guadeloupe.
Les Antilles font face à un exode de sa jeunesse, à cause du manque d'opportunités en Martinique et en Guadeloupe. © AFP/Christophe Archambault
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De notre envoyée spéciale à Perrin

Les derniers feux de la mobilisation crépitent à Perrin en Guadeloupe. Les forces de l’ordre s’apprêtent à faire lever l’un des barrages symboles d’une contestation contre le manque de perspectives économiques pour les jeunes. Dimitri Cyrille se présente comme le porte-parole à Perrin d’une jeunesse qui aspire à partir et ne plus revenir. « Il y a beaucoup de jeunes qui ont bac+5, même plus qui reviennent parce qu’ils veulent rester sur leur territoire, mais ils ne trouvent pas d’emploi. Donc on comprend. On ne peut pas avoir fait toutes ces années d’études pour après se retrouver à être payé au SMIC... », souligne Dimitri Cyrille.

Anaïs, 24 ans et un master de droit en poche, a dû abandonner son rêve : devenir huissier de justice, car il l’obligeait à quitter son île, la Martinique. « Pour faire la formation d’huissier de justice, ça a changé quand j’ai fait mon master. Il fallait partir en métropole et je ne me voyais pas partir », explique-t-elle.

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Le choix des jeunes diplômés locaux

Après plusieurs emplois alimentaires, c’est dans une étude de notaire comme formaliste qu’elle atterrit, gérée par Maître Sébastien Tripet. L’associé notaire ne regrette pas d’avoir misé sur la formation de jeunes diplômés locaux.

« Quand vous faites venir des gens de métropole, ils arrivent ici, mais ce n’est pas leur pays d’origine. On ne sait pas combien de temps ils vont rester alors que le Martiniquais qui est embauché ici, on sait que ce n’est pas quelqu’un qui va partir dans le sens inverse. C’est quelqu’un qui va rester en Martinique et qui va être content d’avoir trouvé un emploi », dit-il. Puis d’ajouter : « On a une étude avec beaucoup de jeunes, on en a certains qu’on a embauchés il y a deux, trois, quatre ans et qui maîtrisent déjà le poste que j’occupe. »

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Redonner espoir aux jeunes et leur donner envie de participer à la société

Embauchée en CDI, Anaïs est passée par la Mission locale à Cité Lacroix, un quartier qui s’est embrasé en novembre. Mais pour Jean-Michel Loutoby son directeur, la jeunesse locale ne peut pas se résumer à l’explosion de cet hiver.

On a à peu près 1 000 à 1 200 jeunes qui rentrent en emploi chaque année. En formation, on a à peu près 300 ou 400 jeunes qui entrent en formation. Il y a quand même quelque chose qui se fait sur le territoire. Il y a des gens qui arrivent à s’en sortir. Et puis tous ceux qui ont besoin d’une main tendue, ont besoin d’un accompagnement, ont besoin d’un déclic... Notre rôle, c’est de leur redonner espoir et donner envie d’être dans cette société et de participer à cette société, à faire en sorte que le jeune ait confiance en lui, et qu’il ait confiance en l’avenir.

Mais pour ne pas alimenter les futures explosions sociales aux Antilles et maintenir la jeunesse sur place, il faut penser loin, dit l’expert. Penser dès aujourd’hui avec les professionnels de l’insertion et les entreprises, aux emplois et compétences dont le territoire aura besoin dans 15, voire 30 ans. 

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