Des clowns au chevet de petits patients: le rire pour oublier la maladie [2/5]
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Deuxième épisode de notre série sur le rire. Aujourd'hui, rire pour oublier la maladie. « On soigne mieux un enfant heureux », c'est la devise de l'association, Le rire médecin. À l'hôpital Louis-Mourier de Colombes, les clowns Mistral et Gaston sillonnent les chambres de l'unité de pédiatrie pour soulager les enfants, les parents et les soignants. Faire rire ou sourire les petits malades est une affaire sérieuse, les comédiens bénéficient d'une solide formation. Les clowns se déplacent toujours par deux pour se renvoyer la balle, et ne pas être seuls dans une situation difficile. Habituellement calmes, les couloirs de l'hôpital résonnent de rires au son du ukulélé. Laurence Théault a mis un nez rouge et a emboîté le pas de ces deux clowns.

Ils ne sont pas encore dans leur peau de clowns, Gaëlle et Laurent s'informent auprès de l'infirmière de l'état de santé et de l'humeur des petits patients : des données indispensables afin d'adapter un jeu sur mesure.
« C'est important de savoir si l'enfant a des douleurs, s'il a pris des médicaments, de connaître son état pour anticiper la manière dont il peut être sensible à notre jeu. S'il faut qu'on ait un jeu plutôt doux, si l'on peut se permettre plus de fantaisies, ou plus de puissance dans le jeu. Vraiment, on adapte le jeu en fonction de la pathologie et de l'état de l'enfant, donc c'est très important », nous raconte Laurent.
Passage par la loge, du rose sur les pommettes, un peu de noir pour marquer les sourcils, une touche de blanc aux paupières, les comédiens se griment face au miroir du lavabo, et voilà Mistral dans sa robe jaune à pois qui l'affuble de grosses fesses, Gaston ajuste sa courte cravate et son chapeau, un nez rouge pour tous les deux.
Quelques entrechats dans les couloirs et voilà le duo de clowns à l'étage, la chambre 5 est occupée par Noam, six ans, un pansement entoure sa petite main, elle est reliée à un pied de perfusion. Mistral et Gaston se hissent au hublot pour observer, puis ils poussent la porte et la magie opère. Les beaux yeux bleus de Noam s'agrandissent encore, le sourire est en grand écart, et le voilà qu'il se prend pour un magicien, entonnant un « Abracadabra ».
Toujours en duo, les clowns improvisent en permanence. Ce sont des virtuoses, ils apaisent, rassurent les enfants, tout en s'adaptant constamment à eux, comme l'explique Gaëlle.
« On vient à leur rencontre. Ce qu'ils ont en commun, c'est la fragilité d'être dans un environnement médical, qui n'est pas familier. C'est cet état-là qui est commun. Il y a toute une fragilité qui est là. Mais les enfants ne rient pas de la même chose. On est dans du vivant. Il y a une mécanique de jeu, mais il y a des enfants, avec qui déjà physiquement, on ne pourra pas accéder au rire, donc on va aller chercher autre chose »
Malgré tous leurs efforts, les clowns ne rencontrent pas toujours le succès escompté, comme le confesse le clown Laurent : « Les bides chez les clowns ne sont pas rares. En tout cas, ils arrivent. Mais le clown, justement, a cette capacité de rebondir. Ça fait partie de l'art du clown que d'accepter, de prendre le bide et d'en faire quelque chose, qui sera drôle ».
Derrière leur nez rouge, les clowns ont une approche sensible, et pas question, mais avec l'accord des parents bien sûr, de s'interdire d'aller à la rencontre d'un petit malade dont les jours sont comptés. Gaëlle raconte en quoi c'est important.
« On y va toujours, parce qu'il y a la vie. Et on va voir le vivant, qui reste, et qui est là jusqu'au bout. Les soins palliatifs, c'est une étiquette médicale, mais ça veut dire qu'on est vivant jusqu'au bout. Nous, on vient jouer pour cette partie-là. Et puis, il y a son parent qui est là, et nous, on est là pour eux ».
Les clowns soignent à leur manière, en témoigne Bettina Mesples, pédiatre à l'hôpital Louis Mourier : « Ce sont des collègues. Pour certains patients, je fais parfois des gestes un petit peu agressifs. Et certains enfants n’acceptent ce geste qu’en présence des clowns. Donc oui, c’est un travail commun, et quelque chose de très positif. J’en suis ravie ! ».
Dans la chambre 6, la petite Sophia boude. Elle ne veut pas voir les clowns, mais leurs facéties font fondre la petite malade. Pas question non plus de venir rencontrer Hamid, fatigué et en colère, il s'est caché sous les draps.
Mais le succès est là dans le couloir, quand Mistral et Gaston croisent Noam, chevauchant son pied de perfusion dans un grand éclat de rire.
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