Expulsion d'Haïtiens en République dominicaine: des conditions inhumaines
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Le gouvernement actuel en République dominicaine assume une politique chiffrée d’expulsions d’Haïtiens depuis plusieurs mois. Luis Abinader, le président dominicain, veut ainsi montrer une certaine efficacité dans sa lutte contre l’immigration illégale. Sauf que tous les Haïtiens ramenés à la frontière ne sont pas sans-papiers, d’autres cherchent à se régulariser et c’est l’administration elle-même qui les en empêche, et enfin les expulsions se font dans des conditions inhumaines. Aujourd’hui, les organismes internationaux et les activistes dénoncent les atteintes aux droits humains qui ont lieu tous les jours en République dominicaine contre les Haïtiens tout particulièrement.

« Depuis tout le temps que je vis ici, je n’avais jamais vu ces rafles, s'exclame Me Rafele Samedi, avocat qui vient en aide aux migrants haïtiens en République dominicaine. J’utilise ce mot, car on ne peut plus parler d’expulsions, ce sont des rafles. » Les scandales se multiplient. Ici, une femme sur le point d’accoucher arrêtée à la maternité. Là, des migrants extorqués de toutes leurs économies par les agents de migration. Les violations des droits humains des Haïtiens sont quotidiennes.
« Il faudrait, au minimum, respecter les droits humains des personnes internées au centre de rétention, affirme Me Samedi, évoquant le centre de détention de Haina, à Saint-Domingue. Par exemple, il faudrait qu’une équipe soit prête pour qu’une fois la personne arrêtée, elle y passe 24 heures maximum, pas un mois ! Là-bas, ils ont faim. Ils pourraient leur donner à manger au centre, mais ce n’est pas fait. Et je ne parle pas de la saleté, tous leurs besoins, ils les font n’importe où car il n’y a pas assez de toilettes, tellement le centre est surpeuplé. »
« Un jour, alors que je sortais de chez moi, je tombe sur le camion des services de migration, témoigne Siméon Sévillier, un ouvrier agricole qui a déjà été expulsé plusieurs fois. Moi, j'ai des papiers. Ils me disent "monte", et je leur réponds "mais j’ai mes documents d’identité", "non, monte, on verra là-bas". Ils m’ont emmené jusqu’à la frontière et il a fallu que je fasse tout le chemin retour. Un autre exemple : j’étais en train de dormir, épuisé, il était 4 heures du matin et les services de migration toquent. Comme nous n’avons pas répondu assez vite, ils ont défoncé la porte et ils sont rentrés, comme ça... Ils entrent où ils veulent. Et comme j’ai tardé un peu, ils m’ont frappé pour me faire monter dans le camion. »
Dans la ville de Dajabón, à la frontière, il ne faut pas attendre longtemps pour voir arriver l’un de ces fameux camion cellule. Junia fait partie du réseau frontalier Jano Siksé qui aide les migrants. Elle est là pour documenter les expulsions : « Ils sont 57, non 67. Seulement des hommes ? Non, il y a des femmes et des mineurs. »
Les gestes des agents de migration sont bien rodés. Ce sont les mêmes quatre à cinq fois par jour. Une soixantaine de personnes dans un véhicule qui devrait en accueillir 40. Tous, même les jeunes enfants, sont poussés sans ménagement vers le côté haïtien. Et dès demain, ils tenteront de traverser la frontière de nouveau.
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