Pression scolaire et sociale: la santé mentale des jeunes mise à rude épreuve en Corée du Sud
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En Corée du Sud, le nombre de personnes ayant cherché à se faire soigner pour une dépression a dépassé le million pour la première fois, d’après un rapport de l’assurance maladie. Une augmentation de 32% depuis 2018. Si toutes les catégories de la population sont touchées par ce phénomène, les femmes dans la vingtaine sont les premières affectées. En cause, la pression du système scolaire sud-coréen ainsi que les difficultés à trouver un emploi stable pour les jeunes diplômés.

De notre correspondant à Séoul,
Comme un million d’autres Sud-coréens, Lee Mirae suit un traitement à base d'antidépresseur. À 23 ans, cela fait maintenant deux ans qu’elle a été diagnostiquée par un médecin pour sa dépression. Une pathologie qui remonte directement à son expérience du système scolaire sud-coréen.
Le Suneung, l’examen national d’entrée aux universités sud-coréennes, est réputé pour son extrême difficulté et la pression qu’il impose sur ses candidats. En Corée du Sud, où l’excellence prime, il est admis que le résultat de ce test est déterminant pour la vie de chacun. Lee Mirae raconte la pression engendrée par l’examen : « Je n’ai pas été acceptée dans l’université que je voulais parce que j’ai raté l’examen. Mon anxiété est devenue si forte que j’avais peur de sortir de ma chambre. J’avais tellement peur d’être comparée aux autres pour le reste de ma vie, détaille la jeune femme. À chaque fois que je révisais, je me disais : "Pourquoi est-ce que j’essaie de faire quelque chose dans lequel je vais échouer ? Ma vie est gâchée." Lorsque j’ai réalisé que le simple fait de regarder le logo du site web du cours en ligne suffisait à me faire paniquer, j’ai décidé de consulter un psychologue. J’étais une enfant naïve qui a cru ce que la société et les parents nous disent, que cet examen déterminerait toute ma vie. »
La dépression, une maladie « honteuse »
Dans la société sud-coréenne, la santé mentale est un sujet encore difficile à aborder. Entre honte et tabou, les malades doivent souvent affronter seuls leur dépression. Lee Mirae témoigne des réactions de ses proches. « La dépression reste un tabou, même si on en parle beaucoup sur YouTube par exemple, dans la vraie vie cela reste difficile à aborder. Les gens restent conservateurs sur ces sujets-là. Quand j’ai consulté un psychologue pour la première fois en 2021, mes parents ont été choqués et en colère. Quand j’ai mentionné à un autre étudiant que j’avais consulté un psychologue et pris des médicaments, j’ai été traitée comme une folle. »
La pression scolaire n’est pas le seul facteur de dépression, la recherche d’un emploi chez les jeunes diplômés s’avère particulièrement éprouvante, c’est le cas de Kang Minji, 26 ans : « Cela fait deux ans que je suis à la recherche d’un emploi, j’ai l’impression que c’est sans fin. C’est très stressant. J’ai perdu confiance en moi et j’ai commencé à avoir de l’anxiété, des troubles dépressifs. Cela a fini par me bloquer dans ma recherche de travail, ce qui me stresse encore plus. C’est un cercle vicieux. Je ne pouvais pas gérer ça toute seule alors, j’ai commencé récemment à consulter un médecin et je prends des anxiolytiques. Mais c’est assez dur de trouver des rendez-vous et cela coûte cher pour quelqu’un sans emploi comme moi. »
Si le nombre de patients atteint de dépression augmente, la Corée du Sud est en grand manque de psychiatres. Le pays est le troisième pire élève de l’OCDE avec moins d’un psychiatre pour 10 000 habitants.
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