La Malaisie envisage une «diplomatie de l’orang-outang», déjà décriée
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À peine envisagée par le gouvernement malaisien, la « diplomatie des orangs-outans » fait déjà sortir les ONGs environnementales de leurs gongs. L’objectif de ce projet : mettre en place une diplomatie similaire à celle de la « diplomatie des pandas » en Chine. Le gouvernement malaisien souhaite offrir des singes à ses principaux partenaires économiques, et notamment aux pays importateurs d’huile de palme… Or l’huile de palme est régulièrement pointée du doigt comme un produit issu de la déforestation, responsable d’une baisse significative de diverses espèces.

De notre correspondante en Malaisie,
Une fourrure « rouille » dans les feuillages se distingue sur l’un des arbres de la réserve naturelle de Semenggoh. Dans cette réserve, les singes sont pour la plupart des rescapés de braconnage. Mais l’équipe de Semenggoh l’assure, d’autres facteurs mettent en danger les orangs-outans, aujourd’hui en danger critique d’extinction. La cause principale : la destruction de leur habitat au profit des activités humaines. La déforestation est ainsi un enjeu majeur pour préserver l’Orang-outan, et plus largement la faune et la flore.
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Une « preuve d’engagement » pour la conservation et la biodiversité ?
Avec le projet de « Diplomatie de l’Orang-outan », le gouvernement malaisien souhaite avant tout cibler les pays importateurs d’huile de palme pour « prouver » l’engagement de la Malaisie en faveur de la conservation de la biodiversité. Johari Abdul Ghani, le ministre des Plantations, a même déclaré que les principaux importateurs comme la Chine, l’Inde, et certains pays de l’Union européenne recevraient ainsi des Orang-outans. Un discours qui ne satisfait absolument pas les associations environnementales.
Alors que ces singes vivent dans la nature uniquement sur l’île de Bornéo, et sur l’île indonésienne de Sumatra, Michelle Desilets, la directrice de l’organisation Orangutan Land Trust déplore cette volonté du gouvernement malaisien : « Ce ne serait pas une bonne idée d'envoyer des orangs-outans hors de Malaisie, vers d'autres pays. Encore plus si c’est pour persuader d'une manière ou d'une autre ces pays à considérer la Malaisie comme engagée dans une démarche de conservation et d’huile de palme durable », explique-t-elle, « si le gouvernement malaisien était sérieux, il soutiendrait beaucoup mieux les mesures de conservation de l’espèce dans le pays, in situ, là où ces singes vivent. Deuxièmement, le gouvernement montrerait un véritable engagement en faveur d’une culture d’huile de palme durable justement ».
Un huile de palme durable pour sauver l’orang-outan ?
La volonté du gouvernement malaisien de mettre en place une diplomatie de l’orang-outan apparaît à l’heure où l'Union européenne interdit depuis peu les importations de produits issus justement de la déforestation. À Kuala Lumpur, Heng Kiah Chun, responsable de campagne chez Greenpeace Malaysia, suit de près le dossier : « L’huile de palme peut être cultivée sans détruire la forêt tropicale si l’industrie accepte de se réformer ! Si la Malaisie s'engage à préserver la biodiversité, à mettre en œuvre une politique de non déforestation, c’est beaucoup mieux que de mettre en place cette diplomatie ».
Pour Datuk Darrel Webber, l’ancien directeur de la Table ronde sur l'huile de palme durable en Malaisie (ndlr : créée pour développer et mettre en œuvre des normes mondiales pour l'huile de palme durable certifiée), les pistes sont multiples pour mettre en œuvre une conservation de la biodiversité : « L’état de Sabah, qui abrite la plus grande population d'orangs-outans de Malaisie, a par exemple exprimé son ambition de mettre toute la région en conformité avec la norme nationale pour une huile de palme durable. Pourquoi ne pas travailler avec ces juridictions qui souhaitent apporter un changement ? Les autorités pourront apprendre et même produire de futures politiques mieux conçues pour produire de vraies solutions sur le terrain ».
Pour l’heure, aucune date de mise en route de cette « diplomatie de l’Orang Outan » n’a été annoncée par le gouvernement malaisien.
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