Reportage international

Au Groenland, le débat sur l'indépendance relancé par l'offensive de Donald Trump

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Les déclarations de Donald Trump de s'emparer du Groenland sont perçues comme une menace par de nombreux Groenlandais. Mais dans ce territoire autonome encore rattaché au royaume du Danemark, l’offensive du président américain a aussi relancé les débats autour de l’indépendance. 

Des manifestants agitent des drapeaux groenlandais devant le consulat américain lors d'une manifestation sous le slogan « le Groenland appartient au peuple groenlandais », à Nuuk, le 15 mars 2025.
Des manifestants agitent des drapeaux groenlandais devant le consulat américain lors d'une manifestation sous le slogan « le Groenland appartient au peuple groenlandais », à Nuuk, le 15 mars 2025. © CHRISTIAN KLINDT SOELBECK / AFP
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De notre envoyée spéciale de retour de Nuuk,

Sur les hauteurs de Nuuk, en cette fin du mois d’avril, Julia Aka Wille se souvient de la manifestation qui a eu lieu quelques semaines plus tôt, le 15 mars, dans le centre-ville : « On dit que c’est la plus grande manifestation de l’histoire du Groenland. La ville était pleine de monde. » Journaliste indépendante, la trentaine, elle nous montre des vidéos qu’elle a tournées ce jour-là. Entre 1 000 et 3 000 manifestants sur les 20 000 habitants que compte la capitale et partout, le drapeau rouge et blanc du Groenland : « Les gens scandaient : "Le Groenland appartient aux Groenlandais". C’était très fort, que tout le monde soit uni autour du fait de dire non à Donald Trump. »

« Ni États-Unis, ni Danemark », c’est la position d’une partie des habitants. Julia estime aussi que les déclarations de Donald Trump ont, de fait, changé la relation entre le Groenland et Copenhague. « Cela a rendu plus facile pour nous de parler d’indépendance. Avant, la question qui nous était renvoyée, c’était : "Comment allez-vous faire, sans l’aide du Danemark ?"  Alors que maintenant, on a une nouvelle carte en main : on peut dire qu’on a aussi d’autres options. »

Ne pas aller trop vite 

Comme près de 80% des Groenlandais, Julia est pour l’indépendance. Mais faut-il divorcer avec le Danemark tout de suite ou plus tard ? C’est là que les habitants sont partagés. Les partisans d’une indépendance rapide ont doublé leur nombre de sièges au Parlement lors des dernières élections, début mars. Leur chef de file, Pele Broberg, n’a pas encore eu le temps de finir de déballer les cartons dans leur nouvelle salle de réunion : « Le Danemark a énormément interféré dans ces élections. »

Le leader de l’opposition pointe du doigt les médias danois qui, selon lui, ont voulu faire peur aux habitants en agitant les menaces d’annexion par les États-Unis : « On s’en fiche, nous, de qui est président des États-Unis ou de qui est roi du Danemark. Regardez cette carte du Groenland : c’est à qui ? C’est au royaume danois. Nous ne sommes propriétaires de rien. »

Un discours qui n’a pas suffi pour gagner le scrutin. C’est un parti de centre-droit, Demokraatit, qui est arrivé en tête. Selon Pipaluk Olsen, l’une de ses députés, c’est grâce à leur position modérée et à leur défense d’une proximité avec Copenhague : « Ce que dit notre parti, c’est qu’il ne faut pas aller trop vite dans le processus. Nous voulons travailler avant tout à l’amélioration des conditions de vie au Groenland. »

Le Danemark contribue encore pour moitié au budget du gouvernement groenlandais. Et même si cette parlementaire estime que le pays est plus divisé qu’avant, fin avril, plus de 200 personnes sont tout de même venues applaudir le roi du Danemark, dans les rues de Nuuk, lors de sa visite officielle au Groenland.

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