À la Une: après le soleil Desmond Tutu, une pluie d'hommages dans la «nation arc-en-ciel»
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« Toujours la foi, toujours la justice ». En Afrique du Sud, le Mail and Guardian, comme les autres journaux, rend hommage à l’archevêque anglican, décédé dimanche 26 décembre à l’âge de 90 ans. Un grand militant anti-apartheid et une « icône internationale des droits humains », rappelle le journal, « l’un des leaders spirituels les plus respectés au monde ». Un monde qui est « meilleur » grâce à lui.
Le Mail and Guardian revient sur les hommages, très nombreux et unanimes, ayant afflué à travers la planète : du président Ramaphosa évidemment, à l’opposant ougandais Bobi Wine, en passant par le Dalaï Lama, un ami, ou bien encore l’entrepreneur britannique Richard Branson, pour ne citer qu’eux. Oui, « le monde a perdu un acteur de la paix et de la réconciliation » renchérit The Times, « mais pour l'Afrique du Sud, c'est bien plus que cela », précise le quotidien. « Le pays a perdu sa conscience et l'étoile polaire qui le guidait depuis les années 1980 ». C’est certain, il était une véritable « boussole morale » relève également The Citizen.
Une vie de foi et d’engagement
Et les journaux reviennent bien sûr sur sa vie. « Une vie bien vécue », pour The Citizen, une vie d’engagement pour le Mail Guardian. Ce dernier rappelle que « Tutu et sa femme ont démissionné de leur carrière d'enseignant, pour protester contre l'injustice raciste de la loi sur l'éducation bantoue de 1953, une politique d'assujettissement délibérément adoptée pour offrir une éducation de qualité inférieure afin de restreindre les apprenants non blancs à des occupations subalternes ».
La voilà, la source de son combat basé ensuite sur « sa foi chrétienne profonde ». Ce qui a donné « à ses paroles et à ses actions une immense gravité morale », analyse le Mail and Guardian. En effet, « qui peut discuter avec l'amour ? » s’interroge le journal de façon rhétorique : « Le gouvernement d'apartheid a essayé et il a échoué ». Une foi qui inspirera d’ailleurs à l’archevêque l’expression de « nation arc-en-ciel » pour parler de l’Afrique du Sud à l’ère post apartheid, souligne The Times. « Lors d'apparitions à la télévision, Desmond Tutu a parlé du peuple arc-en-ciel de Dieu, une métaphore tirée de l'arc-en-ciel biblique apparu après le déluge de Noé ».
Le premier jour de la Commission Vérité et Réconciliation
Un moment particulier de sa vie revient beaucoup dans les journaux, comme pour mieux montrer l’humanisme de celui qui fut prix Nobel de la Paix en 1984, « The Arch » comme on le surnommait. Ce moment, c’est le premier jour des auditions de la Commission Vérité et Réconciliation qu’il a présidée après l'avènement de la démocratie en 1994 et l'élection de son ami Nelson Mandela. Ce jour-là, l’archevêque a « fondu en larmes en entendant les atrocités de l’apartheid », raconte The Star. « Un moment qu'aucun Sud-Africain n'oublierait » selon le journal, mais un moment que Desmond Tutu regrettera finalement nous dit The Mail and Guardian en citant le principal intéressé. « J'ai craqué dès le premier jour, témoignait Desmond Tutu, mais j'ai ensuite dit que ce n'était pas juste parce que les médias se sont alors concentrés sur moi plutôt que sur les personnes qui étaient les victimes légitimes. Après ça, si je voulais pleurer, je pleurais à la maison ou à l'église ». C’était Desmond Tutu, conclut The Star, il était « un guérisseur dans l'âme ». Tutu avait finalement pris sa retraite de la vie publique le jour de son 79e anniversaire, écrit de son côté City Press, mais il avait toujours « continué à parler d'un éventail de problèmes éthiques et moraux, des ventes illégales d'armes à la xénophobie, des opprimés en Palestine ou au Tibet, des musulmans rohingyas au Myanmar ou bien encore des droits de la communauté LGBT+ ».
Une mémoire saluée sur le continent
Et les journaux sud-africains ne sont pas les seuls à saluer sa mémoire. Dans les kiosques du monde entier bien sûr, comme ceux du continent : Fraternité Matin en Côte d’Ivoire, La nouvelle Tribune au Bénin ou bien encore la presse burkinabè. Pour Le Pays notamment, « une page de l’histoire sud-africaine se tourne », car « Desmond Tutu mérite d’être considéré comme l’un des monuments de l’histoire contemporaine de l’Afrique du Sud ».
Pour l’Observateur Paalga, c’est « une grande étoile noire qui s’est éteinte ». Desmond Tutu laisse ainsi « son Église et l’Afrique, voire le monde entier, orphelins d’une voix puissante au service des sans voix ». « Quelle perte immense pour l’humanité et plus encore pour l’Afrique du Sud ! », déplore l’Observateur. En effet, selon le média burkinabè « bien qu’il ait disparu à 90 ans, Desmond Tutu est mort trop tôt parce que son pays avait encore besoin de lui comme conscience morale », car « après plus de 25 ans de démocratie post-apartheid, l’Afrique du Sud est loin d’être guérie des tares qui ont fait la laideur de ce régime ségrégationniste », estime L’Observateur Paalga. Un régime, rappelle le journal, que Desmond Tutu stigmatisait à juste titre comme « le système le plus pernicieux inventé par l’homme depuis le nazisme ». Alors finalement « que retenir d’un si grand homme ? » s’interroge L’Observateur Paalga, dont la réponse sera notre mot de la fin : on peut retenir « beaucoup de choses », tellement que « le cadre étroit d’une chronique ne peut [les] contenir ».
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