À la Une: vague de protestation massive dans les rues ukrainiennes
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« C’est votre première présidence, c’est notre troisième révolution. » Ce slogan, rapporté par El Pais, résume bien l’ampleur de la colère contre le président ukrainien Volodymyr Zelensky. Cela a commencé, d’abord, par « un message relayé sur les réseaux sociaux, retrace le Figaro. Puis un autre. Et encore un autre. » Et pour finir : « une foule de jeunes adolescents, d’activistes, de soldats, de vétérans et de blessés de guerre », réunis en plein cœur de Kiev et dans d’autres grandes villes du pays, pour le deuxième soir de suite.
Ce sont, rapporte le Kyiv Independent, « les premières manifestations d’ampleur nationale depuis le début de l’invasion russe ». Et bien que ces dernières aient été « pacifiques », indique le Washington Post, mercredi soir « la foule frémissait de rage, celle d’une population qui a survécu à près de trois ans et demi d’une terrible guerre, à des attaques de drones quotidiennes, à la perte de proches, et qui doit maintenant affronter la crainte que leur pays abandonne les valeurs même pour lesquelles les soldats ukrainiens se battent, et perdent la vie ».
En cause : la signature d'un texte controversé
Comme le résume le Kyiv Independent, ce texte « réduit l’indépendance des principales institutions anti-corruption ukrainiennes ». Et le Washington Post développe : il s’agit d’ « accorde[r] au procureur général le contrôle de ces agences anti-corruption. » Or, ce procureur est nommé par nul autre que le chef d’État. Et le président Volodymyr Zelensky a beau présenter cette évolution comme « une étape vers plus de justice et d’indépendance à l’égard des influences étrangères, particulièrement russe », toujours est-il, dénonce le Kyiv Independent, qu’il « n’a pas apporté la preuve d’interférences extérieures au sein de ces agences ».
La population craint donc « un retour en arrière, par rapport aux réformes introduites à la suite de la révolution pro-démocratie, il y a plus de dix ans ». Cette réforme, abonde Le Figaro, « marque une rupture avec l’héritage de la révolution de Maïdan de 2014, qui avait placé la transparence et la séparation des pouvoirs au cœur du renouveau démocratique ukrainien. » Et de fait, insiste encore le Kyiv Independent, « nombreux sont ceux à avoir tiré des comparaisons avec Viktor Ianoukovitch, le président pro-russe chassé en 2014 après avoir violemment réprimé les manifestations » de Maïdan.
Une chose est sûre pour le Washington Post, le président s’est « tiré une balle dans le pied », lui qui « a déjà acquis un immense pouvoir dans le bureau présidentiel » et « est accusé par l’opposition de virer vers l’autocratie ».
Quant aux forces de l'ordre, face à cette éruption de colère inédite, elles « n’ont pas osé disperser la foule », relate Le Figaro. « Ce n’est qu’à la fin de la manifestation, après minuit, que les autorités se sont présentées pour demander aux gens de rentrer chez eux, car le couvre-feu était en vigueur », complète El Pais. Mais qu’elles n’aillent pas compter sur un essoufflement du mouvement. Dans les colonnes du Figaro, une manifestante prévient : « On les fera plier. »
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Des réactions à l'international aussi
C’est d’ailleurs une « première » depuis le début de la guerre, souligne El Pais, qui cite notamment « les ambassadeurs du G7 », lesquels « ont déjà souligné dans un communiqué (…) leur grave préoccupation ». Plusieurs hauts cadres de l’Union européenne « ont exprimé de sérieuses inquiétudes », poursuit le Guardian. Et le sous-texte est clair, analyse le site britannique : « Les tentatives ukrainiennes de rejoindre l’UE pourraient être gravement entravées ».
La Russie, elle aussi, y trouve son compte, pointe le Washington Post, elle qui a, « de longue date, amplifié le récit sur la corruption en Ukraine ». L’occasion n’était donc que trop belle d’affirmer que « les impôts des américains et des européens ont été pillés », en référence aux aides massives fournies par les partenaires de Kiev.
Restent, en tout cas, plusieurs questions : d’abord, s’interroge le Guardian, « Zelensky va-t-il rétropédaler en réponse aux pressions des dirigeants occidentaux, ou va-t-il balayer les critiques domestiques et internationales » ? Et puis, il y a une autre source de malaise, soulignée cette fois par El Pais : « personne, en dehors de l’entourage du président, ne sait avec certitude pourquoi le président a pris une décision qui, pour la première fois, le met en porte-à-faux avec l’UE et la majorité de la société ». Mais, persifle le journal, « l’opposition souligne que les organes anti-corruption enquêtaient sur les proches de Zelensky ».
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