Mine de nickel en Indonésie: le financement peu écologique du gouvernement français
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Le gouvernement français a récemment annoncé la création d’un fonds d’investissement pour sécuriser les approvisionnements en métaux et minerais critiques, indispensables, par exemple, à la fabrication de voitures électriques. Une enquête de l’association de protection des forêts Canopée dévoile que ces financements pourraient, entre autres, contribuer à la déforestation de la forêt indonésienne, ainsi que la violation des droits humains des peuples autochtones.

L'entreprise française Eramet porte le projet minier de Weda Bay. Et le gouvernement français possède 27% de cette entreprise. La question que pose Canopée, est de savoir si ce fonds a prévu des critères robustes pour éviter de provoquer de la déforestation en ouvrant des mines. Quelle est la réponse du bureau des mines pour le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires ? « Ce risque n’a pas été identifié par le gouvernement français. »
Ce fonds d’investissement consacré aux minerais et métaux critiques sera alimenté à hauteur de 500 millions d’euros maximum par l’État, et complété par des industriels et financiers pour atteindre à terme deux milliards d’euros.
Ce sont donc 500 millions d’euros d’argent public dépensés sans consultation de la société civile puisque, selon Klervi Le Guenic, chargée de campagne à Canopée, le gouvernement aurait expliqué que seuls les investisseurs auraient un droit de regard, et donc statueraient sur les critères environnementaux.
Risques environnementaux
Située sur l’île d’Halmahera, au large de Sulawesi, en Indonésie, Weda Bay est la plus grande concession de nickel au monde. Les ressources du gisement sont estimées à plus de 12 millions de tonnes de minerais, situées sur 45 000 hectares de zones boisées (soit cinq fois la surface de Paris). Depuis 2020, plus de 2 000 hectares ont déjà été défrichés, sur un total de 6 800 hectares prévus sur 25 ans, explique Klervi Le Guenic.
Canopée souligne que l’exploitation minière est actuellement considérée comme le quatrième facteur de déforestation au niveau mondial. Au Brésil, l’exploitation du fer, de la bauxite (aluminium) et de l’or provoque des ravages en forêt. En République Démocratique du Congo, c’est l’exploitation du coltan en plein cœur de zones de forêts protégées qui est pointé du doigt.
En Indonésie, l’exploitation du nickel est en plein boom, tirée par la demande mondiale croissante. Le président de la République indonésien Joko Widodo a prévu de multiplier par 200 les exportations de nickel (sans précision sur l’échéance). Les conséquences sont déjà visibles : près de 80 000 hectares de forêts ont déjà été défrichés en Indonésie depuis 2001 pour l’extraction de nickel.
Populations autochtones en danger
Cette zone est aussi le lieu de vie d’un peuple autochtone, les Hongana Manyawa, dont le nom signifie « peuple de la forêt ». La forêt leur apporte tout ce dont ils ont besoin pour survivre. L’ONG Survival a estimé que la concession recouvre au moins 30 000 hectares de leur territoire. Et parmi ces populations, certains groupes vivent dans l’isolement, par choix.
Ce que cela implique, c’est qu’ils ne doivent entrer en contact avec personne. Klervi Le Guenic explique que forcer le contact peut avoir des conséquences dramatiques. Ces peuples très isolés n’ont pas développé d’immunité contre les maladies extérieures. Il n’est pas rare que 50% d’un groupe soit décimé suite à un contact forcé. Selon Survival, de nombreux Hongana Manyawa sont déjà morts suite à un contact forcé dans les années 1970 et 1980.
Face à cela, Eramet prépare actuellement l’audit de ses opérations à Weda Bay, afin d’obtenir la certification IRMA (Initiative for Responsible Mining Assurance). Ce standard prévoit bien de garantir le consentement libre, informé et préalable des populations, et elle est très claire sur le fait qu’elle ne certifiera pas de mines si les communautés affectées incluent des peuples autochtones non contactés.
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