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Philippines: regain de tensions dans le Bangsamoro musulman

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Aux Philippines, direction le sud de l’archipel, sur l’île de Mindanao, dans la région autonome du Bangsamoro. Cette partie du pays est musulmane, contrairement à tout le reste des Philippines, qui est en grande majorité catholique. C’est aussi une zone sensible de l'archipel. Au début du mois de mars, une nouvelle vague de violence a eu lieu, alors que le gouvernement philippin a décidé de repousser les premières élections parlementaires de la région au mois d’octobre prochain. Selon les analystes, c’est un délai trop long pour cette partie du pays instable, où la paix est encore fragile. Quelles sont les conséquences de ce report d’élection ?

Une vue de Mindanao du Nord aux Philippines.(Image d'illustration).
Une vue de Mindanao du Nord aux Philippines.(Image d'illustration). © commons.wikimedia.org
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Avec notre correspondant à Manille, Nemo Lecoq-Jammes

Un délai plus long d’incertitude, d’instabilité et donc potentiellement plus de violence au sein de la région autonome du Bangsamoro musulman. Il faut savoir que ces élections étaient très attendues dans cette partie de l’archipel. Pour rappel, elles se seraient inscrites dans le cadre des élections de mi-mandat, le 12 mai prochain, où une grande partie des postes nationaux et municipaux du pays seront soumis au vote des Philippins. Pour la région autonome musulmane du Bangsamoro, c’était l’occasion d’organiser les premières élections démocratiques de son histoire.

Depuis 2014, un processus de paix est négocié entre le principal groupe rebelle, le Front Moro de Libération Islamique, et le gouvernement. Ce processus a abouti à l’autonomie de la région en 2019, après plus de 40 années d’insurrection séparatiste. Cependant, la paix reste encore trop fragile. Les incidents entre les groupes rebelles augmentent depuis deux ans. On en compte près de 3000, rien que pour l’année 2024.

Comment expliquer l’instabilité chronique de cette région ?

Alors, il y a certes la religion. Cette région à majorité musulmane a été longtemps séparatiste, en conflit avec le reste du pays et mise à l’écart. Mais pas seulement. La population du Bangsamoro est aussi la plus pauvre des Philippines et fait face à d’immenses défis liés au changement climatique. Il faut savoir que la région dépend totalement de l’agriculture. Un tiers de sa superficie totale est consacré aux activités agricoles, et 50% de sa main-d’œuvre est employée dans ce secteur. La population est particulièrement vulnérable aux aléas climatiques comme les typhons, les inondations et les grandes périodes de sécheresse. Résultat : elle est constamment sous la menace du manque de moyens de subsistance et de ressources.

Un des exemples concrets, c’est le marais de Ligawasan, au centre de l'île

C’est l’une des plus grandes zones marécageuses de l'île. Elle abrite une riche biodiversité d’espèces et fait vivre plus de 300 000 personnes. Mais elle est aujourd’hui la source de nombreux conflits fonciers. En fait, les ressources du marais sont menacées par le changement climatique, la déforestation, l’exploitation des terres et la pollution par les déchets…

Résultat : les analystes observent des conséquences directes sur l’augmentation de la violence : à cause du manque de ressources, la population a moins de travail, et de plus en plus de jeunes chômeurs aux alentours sont susceptibles de rejoindre des groupes armés.

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