Espagne: la ville de Tolède s'inquiète de la chute du tourisme

En Espagne, c’est un déconfinement progressif qui se met en place. Pour les villes qui vivent en grande partie du tourisme, pesant 12 % du Produit intérieur brut espagnol, le coup est dur. À Tolède, la vieille ville, qui habituellement grouille de touristes, est vide.

Les magasins de Tolède qui étaient fermés rouvrent progressivement depuis lundi 18 mai, mais sans touriste pour l'instant, une inquiétude pour une des villes les plus visitées d'Espagne. RFI/Véronique Gaymard

Il est 11 heures du matin à Tolède, capitale de Castilla la Mancha, ville aux 1 000 ans d’histoire, patrimoine mondial de l’humanité, habituellement visitée par 3 millions de touristes du monde entier chaque année. Mais cette fois, le silence est troublant. Les innombrables boutiques de souvenirs et d’épées ont le rideau métallique fermé.

Non loin de la cathédrale gothique, les rares passants ne sont pas des touristes, mais des habitants qui font leurs courses. « Ça n’a rien à voir avec l’agitation habituelle des touristes, les rues sont silencieuses, il y a moins de gens, c’est agréable aussi, mais oui, la ville est un peu triste… », constate Nuria. Elle est l’ex-présidente de Distrito 1, l’association des petits commerçants de Tolède. Ici tout le monde se connaît, la solidarité joue entre clients et commerçants, on promet de faire des achats dès la réouverture.

► À lire aussi : Coronavirus, l'Espagne adopte un plan de déconfinement prudent, étalé sur quatre « phases »

Au marché central, la poissonnière Raquel porte un masque comme tous ici, ses ventes ont beaucoup baissé. « Les bars et les restaurants attirent les touristes, et nous on vend aux restaurants. Mais en ce moment, on ne vend rien ! Et puis il y a beaucoup d’appartements en location saisonnière, les touristes achetaient pour cuisiner chez eux. Et ça a beaucoup baissé », déplore Raquel.

Plaza de la Magdalena, à Tolède, boudée par les touristes. RFI/Véronique Gaymard

« On est de plus en plus inquiets »

Les restaurants pourront rouvrir les terrasses, mais les hôtels resteront fermés. Certains se préparent à la réouverture, mais pas avant début juillet. « On a beaucoup de touristes français, ils apprécient ce lieu où a vécu le guitariste Paco de Lucía et où il a enregistré un disque… », dit Rafael Carmena. Il gère un hôtel-boutique de cinq chambres, avec son patio décoré de mosaïques de style mudejar et de plantes.

Il réorganise son hôtel, en supprimant une chambre, il installe des flacons de gel désinfectant. « On est de plus en plus inquiets. On a eu des annulations, pas toutes, mais je pense que le tourisme international va beaucoup dépendre des compagnies aériennes. Mais s’il y a une deuxième vague du virus, on est perdus », redoute-t-il.

► À lire aussi : En Espagne, une décontamination au pas de charge

Rassurer les touristes

Les guides touristiques, eux, ressentent déjà les effets de la crise. Manuel Palencia est un historien passionné, il connaît chaque recoin de la ville. Avec son agence Cuentame Toledo, il tente de développer un tourisme individuel avec des offres sur mesure. « On propose des jeux, des parcours dans la ville, que le voyageur peut faire tout seul, pour ne pas être en groupe, on va voir comment ça se développe », déclare Manuel Palencia.

La municipalité de Tolède commence à mettre en place des aides aux commerçants, la maire Milagros Tolon tente de rassurer pour que les touristes reviennent en toute sécurité, elle a aussi annoncé la piétonisation de certaines parties de la ville.

La décision réjouit l’hôtelier Rafael Carmena. « On n’en pouvait plus de ce tourisme de masse qui ne nous laissait plus d’espace, ni pour les touristes ni pour les habitants, il faut qu’on fasse quelque chose », dit-il.