La guerre en Ukraine fait exploser les prix des engrais importés en Afrique. En effet, Russes, Ukrainiens et Biélorusses sont les premiers exportateurs d’engrais azotés vers le continent. Aujourd’hui, les pays et les partenaires au développement s’inquiètent d’une possible crise alimentaire dans certaines régions d’Afrique qui pourrait durer plusieurs années. Comment y faire face ? Peut-on remplacer les engrais importés par des engrais locaux ?

Les agriculteurs africains devront-ils se passer d’engrais cette année ? La question se pose alors que les prix des fertilisants azotés ont explosé sur le marché mondial en raison notamment de la guerre en Ukraine. L’urée, par exemple, produite à partir d’ammoniac a vu son prix multiplier par huit. Il atteint désormais 1 000 dollars la tonne. Résultat, les agriculteurs ne peuvent plus en acheter.
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« Aujourd’hui, en règle générale, une tonne d’engrais équivaut à une production de quinze à vingt tonnes de grains. Du blé ou maïs. Si on n’importe pas aujourd’hui - et l’on voit un manque d’un million de tonnes sur l’Afrique de l’Ouest –, alors automatiquement, on aura un manque de grains de vingt millions de tonnes. Après, explique Mounir Halim, consultant et spécialiste des marchés des engrais en Afrique pour le cabinet Afriqom, le calcul est très facile. On prend le prix du blé à la tonne, et le budget qu’il aurait fallu pour ce million de tonnes d’engrais va être multiplié par cinq ou six pour importer des grains. »
Et les engrais organiques ?
Dans l’immédiat, la solution ne viendra pas des producteurs de fertilisants africains. Car les Nigérians, notamment, profitent de l’aubaine des prix élevés pour écouler une partie de leur production d’engrais azotés au Brésil et en Europe. Peut-on imaginer remplacer les engrais azotés par des engrais organiques ? Ce type de fumure produite à partir de déchets agricoles dans les campagnes. L’organique intéresse de plus en plus les entreprises que ce soit au Ghana, au Burkina Faso ou en RDC, mais la filière n’en est qu’à ses balbutiements, juge Roland Portella, PDG de Dratigus Development, cabinet de stratégie d’entreprises.
« Avant de parler d’industrialisation, il y a des savoir-faire locaux qui existent depuis des millénaires, mais c’est simplement que chaque agriculteur ou bien chaque petit exploitant utilise ou fabrique ces engrais biologiques à minima. Maintenant, comment passer à une échelle industrielle ? Pour cela, affirme Roland Portella, il faut des politiques publiques efficientes qui puissent encourager ces entrepreneurs qui ont l’ambition de créer des usines d’engrais biologiques dans les dix ans à venir. »
À court terme, c’est-à-dire pour assurer en Afrique de l’Ouest les récoltes plantées cette année, des interventions étatiques seront nécessaires. Les banques de développement régionales ou africaines, comme la BOAD ou la BAD disposent de lignes de crédit pour l’achat d’engrais. Il devient urgent de les mobiliser et de subventionner les prochaines campagnes céréalières.
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