En Tunisie, l’économie créative et culturelle séduit de plus en plus les mécènes tunisiens
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Dans un contexte de crise économique, la culture semble être délaissée en Tunisie. Elle représente 0,6% du budget global, selon les derniers chiffres ; le grand musée du Bardo est, d’ailleurs, fermé depuis près de deux ans. Pourtant, Tunis est le théâtre d’un foisonnement culturel. Mais l’écrasante majorité des performances artistiques sont soutenues par des fondations ou par des États étrangers, sans qui l’activité culturelle s’effondrerait. En parallèle, les mécènes tunisiens se multiplient.

De notre correspondante à Tunis,
Bande son onirique réalisée spécialement pour l’évènement. Bienvenue chez Mooja, dernière galerie d’art tunisoise tenue par un binôme tout sourire : « Inès Van Goor, je suis artiste illustratrice… Et Farès Chraïet, je suis designer et galeriste du studio galerie Mooja. On a décidé de réaliser un vieux rêve familial : exposer des bijoux et des vêtements tunisiens. »
160 m2 d’ambiance tamisée et feutrée. Des éclairages travaillés avec soin pour sublimer chacune des pièces. Polyglotte et cosmopolite, l’équipe est au fait des dernières expositions en vogue en Europe. Farès Chraïet qui a vu celle dédiée aux kimonos japonais au Quai Branly à Paris en est revenu plus motivé que jamais. Trois mois plus tard, le résultat épate jusqu’à sa propre mère, à l’origine des collections, il y a quarante ans : « Je te présente ma mère, la collectionneuse. Allemande. »
« De racine allemande, mais de cœur tunisien », insiste sa mère. « Je te propose qu’on passe au salon, il y a mon père là-bas. » S’il présente volontiers sa famille, Farès Chraïet hésite davantage à ouvrir son portefeuille : « Les chiffres ! On ne va pas parler chiffres… ce n’est pas beau ! »(Rires)
« Une richesse incroyable inexploitée »
Au bout de la quatrième relance, il finit par répondre à la question. Pour mettre sur pied cette exposition gratuite et ouverte à tous, il dit avoir déboursé environ 30 000 euros : « Ce n’est pas rentable tout de suite. Sur le court terme, mais sur le long terme, je pense que ça va payer, espère Farès Chraïet. Moi, j’aimerais que d’autres personnes fassent cela parce que l’on est un pays d’une richesse incroyable, mais on ne sait pas l’exploiter. »
Sur place ce jour-là, une visiteuse se réjouit de ce succès. Chiraz Latiri. Elle qui a été ministre de la Culture en 2020, reste cependant prudente à chaque fois qu’elle voit des particuliers investir dans le secteur. « Je suis toujours très perplexe par rapport à la durabilité du projet. Cette crainte vient du fait qu’il n’y a pas chez le Tunisien une vraie tradition d’aller se balader dans une galerie. Et encore moins d’acquérir. Au fait, ces initiatives dépendent de quoi ? Du mécène et des fonds qu’ils vont lever et ça ce ne sont pas des fonds que l’on peut garantir chaque année. »
Le pari de Mooja semble, en tout cas, payant. L’équipe est désormais en tractation avec des interlocuteurs français pour faire voyager l’exposition en dehors de Tunisie.
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