Centrafrique: transhumance à haut risque, les éleveurs pris en étau [2/5]
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Pour Paoua, sous-préfecture du nord-ouest de la Centrafrique, la transhumance représente une richesse qui suscite la convoitise. Autorités officielles et groupes armés se battent pour contrôler et taxer la transhumance. Cette année, la militarisation de la frontière tchadienne (officiellement fermée depuis 2014) et les combats qui opposent les groupes rebelles aux forces pro-gouvernementales ont profondément désorganisé le mouvement des éleveurs qui se sentent acculés.

De notre envoyé spécial à Paoua,
Un demi-bidon plein de sel et les bêtes sont aux anges ! Un éleveur flatte amoureusement la croupe de ses vaches. À plusieurs reprises, les groupes armés ont décimé son troupeau.
« Ils nous arrêtent et nous réclament de l’argent. Si par malheur tu n’as pas d’argent avec toi, alors ils disent qu’ils vont te prendre 10 ou 15 bœufs. Et si on refuse, c’est là que ça risque de dégénérer. Un matin j’étais en brousse avec mon frère, ils nous ont attachés et ils ont volé la moitié du bétail », raconte-t-il.
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Cette année les combats font rage dans la zone de transhumance entre forces loyalistes et groupes rebelles. Et les éleveurs fuient les couloirs traditionnels : « Aujourd’hui on est coincés ! Si on s’éloigne trop, on risque de tomber sur les rebelles et de se faire racketter. Mais si on reste près des villages, ce sont les agriculteurs qui vont nous chasser pour protéger leurs champs ».
« Les éleveurs veulent juste être en sécurité »
« En raison de notre appartenance ethnique, certains nous assimilent aux groupes armés qui sévissent dans la région », s’indigne un responsable de la FNEC, la Fédération nationale des éleveurs centrafricains. « Comment pouvons-nous être complices des groupes armés alors qu’ils pillent notre bétail ? Les éleveurs veulent juste être en sécurité c’est tout ! S’il n’y a pas la sécurité, les éleveurs vont fuir vers le Tchad ou vers d’autres régions », craint-il.
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Pour Amadou Traoré, chef de bureau de l’Organisation internationale pour les migrations à Paoua, « Évidemment, la crise sécuritaire a des conséquences sur la bonne organisation de la transhumance. Les couloirs de transhumance ne sont plus respectés par les éleveurs. Les années précédentes nous n’avions seulement qu’une présence de groupes armés dans la zone, mais cette année, il y a des affrontements. Donc, il y a davantage de conflits, car le bétail est une richesse convoitée », dit-il.
Originaire de Paoua, l'éleveur n’a nulle part d’autre où aller. L’insécurité ne permet pas de descendre à Bangui pour revendre au prix fort son bétail. Il devra se contenter du marché local.
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