Pourquoi le tout-puissant Xi Jinping peine à résoudre la crise immobilière
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Dans son discours d'ouverture du XXe congrès du Parti communiste chinois le 16 octobre, Xi Jinping a rappelé que le développement économique restait la priorité absolue de son gouvernement. Son objectif est de doubler le PIB de la Chine d'ici à 2035. Mais il a été muet sur la crise de l’immobilier. Un secteur moteur aujourd'hui sinistré.
La crise de l'immobilier est une bombe à fragmentation qui exploserait au ralenti. Premier choc visible l'automne dernier avec le défaut spectaculaire d'Evergrande, le deuxième promoteur du pays. Une vingtaine d'autres ont fait défaut dans la foulée : 40% des promoteurs sont en stress financier, a estimé l'agence Standard and Poor's.
Depuis un an, de nombreux chantiers sont à l'arrêt, les ventes et les prix s'effondrent. Moins 30% sur un an. Des centaines de milliers, voire des millions de ménages, attendent en vain la remise des clés. Écœurés, acculés, certains d'entre eux ont entamé la grève des remboursements. Le phénomène s'est répandu comme une traînée de poudre via les réseaux sociaux. Une centaine de villes sont concernées.
Problème économique majeur
Avec la rébellion des emprunteurs, c'est aussi un problème politique pour le régime qui se révèle pour le moment incapable de restaurer le rêve brisé de la nouvelle classe moyenne chinoise. Les millennials ont été biberonnés au mythe de la croissance infinie. Ils sont confrontés à leur première crise économique avec une incidence directe sur leur quotidien, de quoi saper la confiance dans les autorités.
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Comment en est-on arrivé là dans une économie qui reste encore très administrée ? Pour comprendre ce qui se passe, il faut se replacer dans le contexte des années 1990. Construire était alors une urgence pour loger une population urbaine en pleine expansion. Les autorités ont donc longtemps fermé les yeux sur la cavalerie financière pratiquée par les promoteurs. Dans ce système de prévente, les acquéreurs commencent à rembourser avant même que la première pierre ne soit posée.
Les banques refusent de prêter lorsque la santé financière du promoteur est douteuse
Mais les ménages trouvent alors des alternatives auprès de créanciers moins regardants. Dans un contexte toujours euphorique, porté par cette prodigieuse croissance annuelle à 5%. Et par la flambée des prix. À Pékin, ils ont été multipliés par vingt depuis le début des années 2000.
Acheter un appartement est devenu un placement populaire. On investit toutes ses économies dans la pierre. C'est aussi un passage obligé pour un jeune homme à la recherche de l'âme sœur. Le logement étant un préalable indispensable pour convaincre les futures belles-mères. En 2008, 70% acquéreurs étaient des primo-accédants, ils n'étaient plus que 20% dans ce cas en 2018.
Xi Jinping n'arrive pas à juguler cette crise
Il y a deux ans, il a sifflé la fin de la récréation en rappelant qu'un appartement sert d'abord à se loger et non à spéculer. Il applique alors des règles draconiennes pour freiner ce marché devenu fou. Ces fameuses trois lignes rouges auraient précipité la chute des promoteurs. Depuis, le pouvoir a desserré la contrainte en abaissant les taux d'intérêts et en encourageant les provinces à racheter les dettes des promoteurs. Mais les collectivités, elles aussi, sont éreintées par cette crise immobilière, car le gisement de ressources fiscales liées à cette activité s'est asséché.
La nouvelle équipe que Xi Jinping nommera à l'issue de ce XXe congrès aura la lourde tâche de trouver des solutions pérennes pour réparer ce moteur encalminé. Pour faire repartir la fameuse croissance chinoise. Pour endiguer le risque de crise financière majeure et, bien sûr, pour tenir la promesse de la prospérité partagée.
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