Le «green deal» européen serait-il trop ambitieux?
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La transition écologique de l'Europe, ce projet immense, divise encore beaucoup les États membres. L'Union européenne est le premier continent à s’être doté d’un plan de transition qui prévoit zéro émission de carbone à l’horizon 2050 et une baisse de 55% dès 2030. Mais les négociations avancent difficilement sur certains textes-clés de ce green deal.

C’est le cas pour l'une des mesures phares sur le développement des énergies renouvelables. Le texte qui a été négocié d'arrache-pied est remis en question par la France.
Il prévoit de porter à 42,5% l'objectif de déploiement des énergies renouvelables dans la consommation totale d'énergie en Europe en 2030, soit presque le double du niveau actuel. Le gouvernement français se dit à présent sceptique et estime qu'« un travail supplémentaire sur ce texte » est nécessaire. Pour éviter tout blocage frontal, la présidence suédoise a décidé de retirer le sujet de l'agenda des ambassadeurs cette semaine.
Une déclaration qui intervient dans un contexte où la France demande « une pause réglementaire dans les normes environnementales ».
Cette phrase prononcée par Emmanuel Macron il y a une dizaine de jours a jeté le trouble sur les ambitions de la France en pleine crise climatique. Depuis, la Première ministre, elle, a réaffirmé son soutien au « Pacte vert » européen tout en martelant qu'il n'était pas utile de « rajouter des normes aux normes ».
Or, si l'essentiel des textes clés du green deal ont déjà été adoptés, une partie fait encore l'objet de difficiles négociations. Le groupe PPE de la droite européenne, principale formation au Parlement de Strasbourg, réclame notamment « un moratoire » sur certains projets législatifs liés aux pesticides et à la restauration de la nature, s'alarmant d'un impact trop lourd sur les rendements agricoles. De nouvelles études ont été réclamées. Résultat : aucun accord n'est en vue sur le texte visant à réduire drastiquement l'usage des pesticides.
D'autres textes sur les emballages, la pollution, le recyclage ou la vaste question de la défense de la biodiversité font encore l'objet d'âpres pourparlers.
Le nerf de la guerre, comme souvent, est le financement et les fonds qui vont être débloqués par l'Europe pour la mise en œuvre de ce pacte vert
L'Europe s'est engagée à mobiliser au moins 1 000 milliards d'euros jusqu'en 2027 pour réussir la transition bas-carbone des 27 pays membres qui vont devoir faire face à des investissements colossaux pour mettre en œuvre ce green deal. C'est là que la taxonomie entre en ligne de compte : il s'agit d'une classification des activités économiques ayant un impact favorable sur l'environnement. Or les investissements dans ses activités vertes peuvent bénéficier d’aides européennes. La France par exemple a demandé l’inscription du nucléaire dans cette liste. L’Allemagne non seulement est contre, mais demande que le gaz y figure, au moins à titre transitoire.
On le voit, l'Europe est confrontée à des choix cornéliens puisqu'il lui faut à la fois investir massivement dans de nouvelles capacités de production d’électricité, renouvelables, mais aussi pilotables comme le nucléaire, dans des réseaux de transport et de distribution d’électricité pour absorber ces nouvelles capacités, mais aussi dans des capacités de stockage.
Pour les industriels, en particulier dans les secteurs les plus énergivores comme la métallurgie, la chimie, c'est une course contre-la-montre qui a commencé, pour arriver à atteindre ces objectifs à la fois techniques, économiques, financiers mais aussi sociétaux.
Et tous les pays ne vont pas au même rythme. Alors la question pour l'avenir pourrait être celle-ci : que se passera-t-il en cas de crise majeure (comme un black-out électrique ou encore une rupture d’approvisionnement en produits stratégiques) ? Est-on certain que la solidarité entre les États membres jouera ? La guerre en Ukraine et la hausse des prix de l'énergie est un premier test pour l'après-2024 et un éventuel second « Pacte vert ».
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