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L’envolée de la dette publique: vrai problème ou fausse solution?

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Aux États-Unis comme en France, les frayeurs causées par le surendettement de l’État ont été surmontées de justesse ces derniers jours. Mais le problème de la dette demeure entier.

À une écrasante majorité, les représentants ont voté en faveur de l’accord qui va permettre à l’État fédéral d’emprunter pour payer ses dettes en échange d’une baisse des dépenses budgétaires, le 1er juin 2023 à Washington.
À une écrasante majorité, les représentants ont voté en faveur de l’accord qui va permettre à l’État fédéral d’emprunter pour payer ses dettes en échange d’une baisse des dépenses budgétaires, le 1er juin 2023 à Washington. © AP/Jose Luis Magana
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La situation américaine est la plus frappante. Républicains et démocrates sont tombés d’accord pour suspendre le plafond de la dette, mais ils n’ont pas l’intention de limiter le recours à l’endettement. D'abord côté des dépenses : les dépenses sociales, le medicare entre autres, sont l’un des moteurs du surendettement américain, elles ont été sanctuarisées. Du côté des recettes fiscales, les Républicains refusent catégoriquement d'augmenter les impôts pour limiter le recours à l’emprunt. Étant donné l’évolution démographique, le vieillissement des « baby boomers », une classe d'âge par définition très fournie, les dépenses de santé et de retraite vont continuer à augmenter, tout comme le budget de la défense pour faire face aux nouvelles menaces en Asie et bien sûr les dépenses nécessaires pour financer la transition énergétique. La dette américaine va donc continuer à s’envoler. Elle vient de crever le plafond des 31 000 milliards de dollars avec ce nouveau psychodrame au Congrès, mais il y en aura bien d'autres avant 2030, année où elle devrait dépasser le seuil des 50 000 milliards de dollars.

En France, l’État a évité la dégradation de sa note par l’agence Standard and Poor’s, sans pour autant être à l’abri d’une crise de la dette

L'agence américaine lui conserve son double A sans perspective négative. À court terme, le danger s'éloigne. La dette française demeure très attractive, les investisseurs en sont friands. Et le gouvernement multiplie les signes de bonnes volontés pour redresser des comptes publics. La France a promis à Bruxelles de réduire le poids de sa dette par rapport au PIB et son déficit budgétaire d’ici 2027. Mais ses choix ne convainquent pas les experts des finances publiques. Car Bercy compte sur le rétablissement du plein emploi pour abonder les caisses. Pour le moment, aucun plan d'envergure ne se dessine pour diminuer les dépenses ou augmenter les taxes, les deux meilleurs leviers pour réduire l'endettement.

La France et les États-Unis ne sont pas les seuls États très dépendants de la dette

Effectivement, quasiment tous les pays membres de l’OCDE ont vu leur dette exploser au cours des trente dernières années et la tendance n'est pas prête à s’inverser. En Europe, une dizaine de pays dont la France sont considérés comme très exposés à un risque de crise de la dette. Mais rares sont ceux qui ont une politique d’ajustement pour maitriser la dérive des finances publiques. Le retour de l’inflation est vécu comme une aubaine qui permet d’amortir sans effort le coût de la dette. Ce n’est pas indolore pour tout le monde. Les épargnants sont lésés par l’inflation, or ce sont eux qui financent les investissements nécessaires pour préparer l’avenir.

La dette n’est donc pas encore un problème pour les États?

Elle est même encore perçue comme la solution. Prenons la transition énergétique, la taxe sur les 10% de contribuables français les plus riches proposée par l'économiste Jean Pisani-Ferry pour la financer a été immédiatement écartée par les gouvernants, la dette sera l'alternative, on parle volontiers de bonne dette parce qu'elle prépare l'avenir. L'endettement n'est pourtant pas éternel. C'est un peu comme l'euphorie boursière, il finit toujours par atteindre un plafond qui s'écroule quand les investisseurs n’ont plus confiance ou quand les États ne peuvent plus honorer leurs échéances. Les pays les plus pauvres en font l’amère expérience. Plus d’une cinquantaine d’entre eux sont déjà en crise de la dette. Avec la hausse des taux, l'heure de vérité approche. Elle intervient au pire moment pour des États contraints d'investir davantage et donc de dépenser plus dans la défense, le climat, l’éducation, la santé et la retraite.

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