Retour sur l'annonce de Bruxelles de la préparation d’une nouvelle législation sur la liberté des médias en Europe. Un texte qui intervient alors que plusieurs pays d’Europe se posent des questions sur leurs médias.

Vera Jourova, la vice-présidente de la Commission, a elle-même résumé le propos de cette future loi sur la liberté des médias, dite Media Freedom Act, en disant que ce qui constitue un pilier de la démocratie ne pouvait se fissurer du fait de pressions de gouvernements ou de groupes privés.
Il y a d’abord les atteintes au pluralisme dans les services publics. Il suffit d’y placer des dirigeants entièrement dévoués au pouvoir en place qui eux-mêmes se débarrassent peu à peu de journalistes critiques. On songe à la Hongrie notamment où le fonctionnement médiatique est « perverti » et où des lois peuvent « éliminer les voix discordantes », selon Irene Khan, la rapporteuse spéciale de l’ONU pour la liberté d’opinion.
Quid de l'impartialité à l'approche des élections
À l’approche des élections, au printemps, l’impartialité des médias publics ne peut donc pas être garanti : ces médias semblent être un relai du gouvernement tandis que des proches de Viktor Orban ont racheté peu à peu des médias privés pour changer leur ligne éditoriale dans un sens favorable à leurs opinions, ou à leurs intérêts s’ils bénéficient de contrats publics.
On pourrait aussi citer le cas de la Pologne qui a fait voter en décembre une loi qui peut entraîner un changement forcé de la propriété des entreprises de médias dès lors que l’actionnaire ne relève pas de l’Union européenne. Même si le président Andrej Duda y a mis pour l’heure son veto, c’est une manœuvre inventée par le PiS, le parti au pouvoir, pour se débarrasser de l’indépendance de la chaîne TVN24, détenue par le groupe américain Discovery.
Des sujets gênants écartés
Il y a bien sûr d’autres exemples en Europe, et la France est aussi à regarder de près. Il y a d’abord le sort du service public. Après son élection, Emmanuel Macron avait réduit de 160 millions d’euros les moyens de France Télévisions et c’est dans les émissions d’investigation Envoyé spécial et Complément d’enquête que la direction avait commencé à chercher ces économies. Aujourd’hui encore, on ne sait pas si le service public continuera de bénéficier d’une redevance dédiée et s’il devra, comme la BBC, subir l’inflation.
Ensuite, comme en atteste une commission d’enquête sénatoriale, de nombreux propriétaires de médias vivent de la commande publique et des sujets gênants peuvent être écartés. C’est ce que vient de révéler Jean-Batiste Rivoire dans un livre, L'Élysée (et les oligarques) contre l'info, où il raconte comment une journaliste s’est vu refuser par l’émission Quotidien de Yann Barthès une enquête étayée sur des ventes d’armes de la France à l’Arabie saoudite alors même que l’actionnaire de cette chaîne, le groupe Bouygues, fait des affaires dans ce pays.
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