Un collectif « Stop Bolloré » a été lancé mercredi par des syndicats de journalistes, des associations, des médias indépendants et de personnalités de gauche, alors que le groupe breton a fêté jeudi ses 200 ans d’existence.

Il fallait voir jeudi Vincent, Cyrille et Yannick, le père et ses deux fils, devant une petite église en costume traditionnel breton à Ergué Gabéric, près de Quimper, pour mesurer l’attachement des Bolloré à cette identité qui ferait presque oublier, au son du biniou, à qui l’on a affaire. Car Vincent Bolloré a beau rappeler la légende familiale de la petite papèterie de l’Odet créée par un ancêtre il y a 200 ans, c’est aujourd’hui une multinationale de 80 000 salariés de 24 milliards d’euros de chiffre d’affaires et qui est présente en Afrique comme dans de nombreux pays à travers Canal+, Havas, Editis et demain Hachette.
Or, c’est précisément ce groupe qui commence à voir se soulever devant lui un front du refus face à ce que des personnalités et des organisations qualifient d’« empire médiatique tentaculaire » au service d’une « idéologie réactionnaire ». Le collectif « Stop Bolloré » est soutenu par des syndicats de journalistes, le SNJ et le SNJ-CGT, l’avocat Arié Halimi, mais aussi par des journalistes indépendants comme Edwy Plenel ou Daniel Schneidermann. Ce collectif met en cause CNews, en particulier, et il a saisi l’Arcom à propos des opinions qui y sont diffusées. La chaîne de l’ancien chroniqueur et actuel candidat à la présidentielle Éric Zemmour est accusée de « nourrir une obsession pour les thèmes d’extrême droite ».
Une retraite en apparence
Alors Bolloré, stop ou encore ? Une partie de la réponse vient de Vincent Bolloré lui-même, puisqu’il s’était donné jusqu’au 17 février 2022 pour prendre sa retraite, à la veille de son 70e anniversaire. Or, si le fils Cyrille, âgé de 36 ans, est bien depuis trois ans le PDG du groupe Bolloré, si l’autre fils Yannick est bien à 42 ans le patron d’Havas et président du conseil de surveillance de Vivendi, le patriarche reste celui qui décide de tout, ne serait-ce que parce qu’il garde la main sur la holding de contrôle du groupe, la Compagnie de l’Odet.
Va-t-il peu à peu se retirer du monde des affaires pour devenir une sorte de grand chef soucieux d’apporter sa pierre à la conservation de l’édifice de son pays ? C’est sans doute son rêve, et ce qui le motive dans son soutien à Éric Zemmour, soutien non assumé puisque Vincent Bolloré continue de se dire « démocrate-chrétien », sans aucune visée idéologique et n’investissant dans les médias que pour leur rentabilité.
Finalement, le faux départ de Vincent Bolloré est un peu à l’image de son groupe. Une retraite en apparence de tout ce qui a trait aux affaires du monde, mais en réalité une manière de s’y impliquer à travers des médias de façon de plus en plus prégnante et politique.
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