Chronique des matières premières

Hausse des prix du gaz: un cocktail détonant

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Les prix du gaz atteignent des sommets en Europe, mais sont aussi en augmentation en Asie et aux États-Unis. À l’origine, un cocktail de facteurs qui rend l’équation difficile à résoudre à court terme.

Les consommateurs pourraient être contraints de baisser leur chauffage s'ils ne veulent pas payer des factures trop salées.
Les consommateurs pourraient être contraints de baisser leur chauffage s'ils ne veulent pas payer des factures trop salées. © CC0 Pixabay/Magnascan
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S’il fallait résumer la situation actuelle, on pourrait dire que l’hiver va être long. Et froid, car les consommateurs pourraient être contraints de baisser leur chauffage s’ils ne veulent pas payer des factures trop salées. La demande en gaz ne devrait en effet que croître dans les prochains mois. Difficile d’envisager en effet une stabilisation des prix, donc, avant la fin de l’hiver. La situation déjà tendue pourrait vite devenir explosive.

L’Europe est concernée en premier chef par la hausse des cours, mais l’Asie est aussi dans la tourmente. Les États-Unis assistent également à une augmentation des prix, mais craignent surtout que ce soit pire demain, si l’industrie américaine décidait de vendre son gaz liquéfié au plus offrant.

La forte demande se greffe sur des stocks trop bas

Le premier facteur qui explique cette crise énergétique, c’est la très forte demande mondiale liée à la reprise économique. Une demande qui arrive à un moment où les stocks européens sont bas, ils ont fondu après un hiver dernier plus long que prévu et le manque de vent en Grande-Bretagne qui a fait chuter le rendement des éoliennes.

L’arrêt des activités l’année dernière a fait baisser les investissements, ce qui a aussi entraîné automatiquement le déclin naturel des champs de pétrole et de gaz, c’est-à-dire une baisse des capacités de production.

Le malheur de l’Europe, c’est que l’Asie est le moteur de la reprise économique et donc très gourmande en énergie. La concurrence est rude et l’Asie ne se prive pas de faire monter les enchères pour être approvisionnée en gaz naturel liquéfié, au détriment certains jours de l’Europe, qui voit des méthaniers changer de route pour aller au plus offrant.

Quid de l’approvisionnement russe

Autre facteur, l’inquiétude liée à l’approvisionnement russe dont dépend en grande partie l’Europe. Pour l’heure, il n’a pas baissé, précise Thierry Bros, professeur à Sciences Po et expert en énergie. Mais il n’a pas augmenté non plus. La Russie aurait la capacité de fournir plus, précise notre interlocuteur, mais elle se mettrait alors en défaut avec les contraintes européennes qui limitent les parts de marché des fournisseurs à 40 %.

Et surtout, Moscou rendrait service à l’Europe, alors que le pays vit très mal la méfiance européenne sur le gazoduc Nord Stream 2. Résultat, le géant Gazprom ignore pour l’instant les suppliques de l’Agence internationale de l’énergie et se contente d’honorer ses obligations contractuelles tout en se délectant des prix qui montent.

Sachant que les capacités supplémentaires de production de Gazprom sont quasi réduites à néant l’hiver, elles ont peu de chance de profiter à l’Europe, si un accord était trouvé trop tardivement.

Un début de normalisation pas avant 2022

Seule issue à la crise à court terme pour faire baisser les prix : des subventions inédites des États aux consommateurs et une baisse de la demande, avec l’arrêt forcé des industries non prioritaires.

Cette hausse des prix est transitoire pour l’agence de notation financière Fitch Ratings qui estime que les prix devraient commencer à se normaliser en 2022 et retrouver leur niveau moyen de long terme en 2023.

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