Chronique transports

Olivier Barrot raconte sa croisière Covid avec «Vaisseau Fantôme»

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C'est en pleine mer au large de l'Amérique du Sud que nous mène l'écrivain-journaliste Olivier Barrot, auteur de Vaisseau Fantôme. Un vaisseau fantôme qui n'est autre que le paquebot sur lequel Olivier Barrot devait donner une série de conférences littéraires. Mais la pandémie de Covid a surgi et le navire a erré sans pouvoir accoster.

L'écrivain et journaliste français Olivier Barrot, à Paris, août 2022.
L'écrivain et journaliste français Olivier Barrot, à Paris, août 2022. © Aurelien Morissard / AP
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RFI : L'une des choses les plus marquantes de votre livre Vaisseau Fantôme, est le rôle du capitaine. Vous dites qu'il a immédiatement tenu à mettre les choses au point, le chef à bord.

Olivier Barrot : Oui, tout a basculé. Il a montré qu'il était là pour prendre les mesures de précaution nécessaires jusqu'à décider de nous enfermer dans les cabines. Chaque jour, nous recevions ses messages dans nos cabines.

Combien de passagers ?

Près de 1 000 passagers et 1 000 autres personnels et membres de l'équipage. Cela fait une grande communauté humaine. La plupart des passagers sur ce genre de croisière sont des personnes âgées et souvent malades. Ces personnes ont besoin de leur traitement. Nous étions partis pour seulement 15 jours. Nous sommes finalement restés cinq semaines. Il n'y a pas eu de panique à bord heureusement.

Vous dîtes vous être sentis prisonnier errant en pleine mer.

Oui, sur ce paquebot, nous ne savions pas où l'on allait, ni où nous pourrions accoster, ni combien de temps cela prendrait. En attendant, il fallait pouvoir ravitailler le navire en matériel médical pour les cardiaques, les diabétiques. Des passagers pour lesquels la prise de médicaments est une question de vie ou de mort.

Un pari impossible puisqu'aucun pays, début 2020, n'autorisait les paquebots de croisière à débarquer sur leurs côtes.

Parfaitement, pourtant, cela a été fait par barges en pleine mer. Un truc incroyable, invraisemblable ! Tous les pays riverains du Pacifique, l'Équateur, le Pérou, l'Argentine, la Colombie, interdisaient leur accès. C'est en passant par le canal de Panama que nous avons pu être ravitaillés en médicaments, en fuel et en nourriture.

Justement, d'ordinaire, les passagers de croisières vont au restaurant du navire. Là, confinés dans vos cabines à bord, comment faisiez-vous pour manger ?

Le personnel nous apportait des plateaux à la porte de nos cabines. Ils frappaient à la porte quand c'était déposé. Nous ne les voyions pratiquement pas. Ils portaient des masques. Tous étaient philippins. 

Dans votre livre, vous saluez leur courage.

Ce sont d'excellents professionnels. J'ai eu l'occasion de me rendre compte de leur efficacité, ils voient tout, ils font attention à chaque détail pour assurer le confort des passagers. 

L'une des choses les plus étonnantes de cette aventure en pleine mer, c'est cette radio qui servait au capitaine. Vous vous en êtes servi pour distraire les passagers enfermés en cabine.

Oui, nous pouvions communiquer de cabine en cabine. J'avais entendu des passagers me dire leur angoisse. Nous ne savions pas grand-chose mais nous savions qu'il y avait des cas de Covid à bord. C'était le début de cette épidémie. Un virus inconnu et pas de vaccin à l'époque. Certains de mes voisins avaient des envies suicidaires tellement ils avaient peur. Je me suis dis que je pouvais leur raconter des choses, mes voyages, mes chroniques de lectures sur des auteurs de livres... Juste pour les distraire et les soulager.

Qu'est-ce que cette vie sur le bateau vous a appris sur les navires de croisières ?

Qu'il y a une morgue à bord de ce genre de bateau !

Durant et après la pandémie, les réseaux sociaux se sont fait l'écho d'un besoin de changer nos habitudes de voyages. Halte aux transports chargés avec des gens qui sont tous en grande proximité. Mais également la pollution des gros paquebots. Pourtant, le marché reprend de plus belle… On oublie ?

Une épidémie mondiale n'arrive qu'une fois par siècle. Pour la pollution, je pense à Venise et aux paquebots qui approchent trop près de la Cité, en dépit des mesures prises pour interdire l'accès, c'est regrettable. Pourtant, moi-même, je vais repartir donner des conférences sur un grand navire de croisière en septembre 2023. Oui, je crois qu'on a envie d'oublier, tout du moins de mettre ce choc et cette angoisse un peu de côté.

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