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Chine: «La visite du président algérien arrive dans un moment où Alger cherche à redynamiser son économie»

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Xi Jinping a plaidé mardi 18 juillet pour un renforcement du partenariat stratégique avec l’Algérie alors que le président algérien Abdelmadjid Tebboune est en visite en Chine jusqu’à vendredi, accompagné d’une dizaine de ministres et de dirigeants d’entreprises. Économie, candidature aux BRICS, diplomatie… Quels sont les enjeux de ce déplacement ? Brahim Oumansour, directeur de l’Observatoire du Maghreb à l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris) est l'invité de RFI. 

Le président chinois Xi Jinping (G) marche avec le président algérien Abdelmadjid Tebboune (D) lors d'une cérémonie de bienvenue au Grand Hall du Peuple à Pékin, le 18 juillet 2023.
Le président chinois Xi Jinping (G) marche avec le président algérien Abdelmadjid Tebboune (D) lors d'une cérémonie de bienvenue au Grand Hall du Peuple à Pékin, le 18 juillet 2023. © AFP / NG HAN GUAN
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RFI : Brahim Oumansour, cela faisait 15 ans qu’un président algérien ne s’était pas rendu en Chine. Qu’est allé chercher Abdelmadjid Tebboune à Pékin ?

Brahim Oumansour : La visite du président algérien à Pékin s’inscrit dans le retour d’Alger sur la scène régionale et internationale depuis la chute de l’ancien président Abdelaziz Bouteflika. Elle s’inscrit également dans la volonté de renforcer la coopération bilatérale entre les deux pays qui ne cesse de s’intensifier, notamment depuis les dix dernières années.

La Chine est depuis une petite dizaine d’années le premier partenaire commercial de l’Algérie. Des mémorandums d’entente et des accords ont été signés dans plusieurs domaines, dont les télécommunications, le commerce et le transport ferroviaire. Le but de cette visite est-il d’étendre ce partenariat à de nouveaux domaines ?

En effet, aujourd’hui, le partenariat économique entre les deux pays est très important. C’est la Chine par exemple qui a construit une partie de l’autoroute est-ouest, environ 1 200 kilomètres, puis l’élargissement de l’aéroport d’Alger, la grande mosquée d’Alger. Et il y a eu, récemment aussi, la signature d’un partenariat visant l’exploitation du phosphate algérien avec la création d’une entreprise conjointe entre les deux États. Aujourd’hui, cette visite arrive dans un moment où Alger cherche à redynamiser son économie après une longue période de récession et de crise aggravée notamment par la pandémie du Covid-19, puis la guerre en Ukraine et l’inflation qui en découle.

La Chine peut-elle aider l’Algérie à diversifier son économie ?

Malgré la proximité entre les deux pays, les entreprises chinoises sont très peu représentées en Algérie par rapport par exemple à des entreprises françaises. La coopération est très déficitaire en termes d’échanges, il y a très peu d’importations chinoises de produits algériens en dehors des produits pétroliers, gaziers et des minerais.

On comprend bien donc que le but aussi de ce voyage, c’est de permettre aux sociétés algériennes de trouver de nouveaux débouchés pour leurs produits.

Exactement, la présence de chefs d’entreprise algériens traduit cette volonté de créer un partenariat qui serait aussi favorable à la production algérienne et à l’exportation de produits algériens.

L’Algérie a fait acte de candidature pour intégrer les Brics (groupe de cinq pays qui se réunissent depuis 2011 en sommets annuels : Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud). Abdelmadjid Tebboune est venu solliciter à nouveau l’appui de Pékin dans ce dossier à un mois du sommet des Brics. La Chine a renouvelé son soutien à cette candidature. Celle-ci, selon vous, a-t-elle une chance d’aboutir ?

L’Algérie détient plusieurs atouts bien évidemment, géostratégiques, aussi comme pays énergétiques. Mais il y a quand même des points qui pourraient entraver son adhésion sur le plan structurel. Les Brics exigent quand même des critères auxquels l’Algérie va devoir répondre, notamment la dévaluation du dinar qui est très handicapante pour le moment, des réformes importantes sur le plan financier. L’Algérie, je le rappelle, est très en retard dans l’intégration du marché mondial et cela va demander peut-être à l’Algérie beaucoup d’efforts en termes de réformes structurelles.

Le président algérien était en Russie le mois dernier. Comment interpréter ce voyage à Moscou en pleine guerre en Ukraine et alors qu’on attendait plutôt Abdelmadjid Tebboune à Paris ?

Cela s’explique par le contexte mondial bien sûr. La pression exercée sur Alger par les Occidentaux qui exigent d’Alger de prendre ses distances avec Moscou. Aujourd’hui, Alger tient en tout cas à affirmer ce lien stratégique avec Moscou tout en gardant une certaine neutralité et distance par rapport à la guerre en Ukraine. Je rappelle que l’Algérie s’est abstenue lors du vote à l’ONU visant à sanctionner l’intervention russe en Ukraine.

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