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La réalisatrice Catherine Corsini: «J'avais envie de donner une chance à des jeunes gens»

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Au Festival de Cannes, le film de Catherine Corsini, Le retour, a été projeté mercredi soir au premier jour de la compétition. La sélection tardive du film au festival s’est accompagnée d'une controverse : le film s'est vu privé de ses financements publics après la non-déclaration aux autorités d'une scène sexuelle simulée impliquant une actrice de moins de 16 ans, scène qui n'est pas dans le film.

De gauche à droite : les actrices Virginie Ledoyen, Lomane De Dietrich, Suzy Bemba, Elizabeth Perez et la réalisatrice du film "Le retour", Catherine Corsini, sur le tapis rouge du Palais des festivals à Cannes, le 17 mai 2023.
De gauche à droite : les actrices Virginie Ledoyen, Lomane De Dietrich, Suzy Bemba, Elizabeth Perez et la réalisatrice du film "Le retour", Catherine Corsini, sur le tapis rouge du Palais des festivals à Cannes, le 17 mai 2023. WireImage - Daniele Venturelli
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Parallèlement, des dénonciations ont fait état d'un mauvais climat sur le tournage, conduisant l'instance paritaire du cinéma, chargée des conditions de travail, à dépêcher une enquête. La réalisatrice parle d'acharnement et a refusé de répondre aux questions sur la polémique, préférant se concentrer sur son film entièrement tourné en Corse le temps d'un été. Le retour d'une femme et ses deux filles adolescentes sur les traces d'un passé douloureux.

RFI : Catherine Corsini, vous êtes de retour à Cannes. Vous étiez là, il y a deux ans, avec La Fracture. Aujourd’hui, vous êtes là avec votre nouveau film, Le Retour. Et vous nous emmenez en Corse avec un trio féminin : une mère et ses deux jeunes filles adolescentes, qui vient garder les enfants d’une riche famille parisienne. Et vous nous montrez comme souvent dans vos films un peu le choc des cultures…

Catherine Corsini : Oui, effectivement. Il y a cette famille bourgeoise jouée magnifiquement par Denis Poladylès et Virginie Ledoyen. Cette famille bourgeoise dépassée par le monde d’aujourd’hui, qui devant sa fille qui l’exaspère parce que cette liberté de ces jeunes filles avec leurs nouvelles revendications, on sent que lui qui est un homme de gauche n’est pas du tout en phase. On sent très lointainement quand même quelque chose avec la dame qui s’occupe de leurs enfants, Khédidja, quelque chose d’un relent lointain de colonialisme, même s’ils veulent être les parfaits patrons. Il y a quelques touches qui sont à la fois humoristiques qui montrent toujours, comme je le fais dans mes films, la complexité des rapports de classe et comment échapper justement à sa classe sociale, et comment reconnaître l’autre dans toute son identité.

Khédidja arrive en Corse avec ses filles. Elle les ramène en fait au pays natal. Mais, elle ne leur en a jamais parlé. C’est une femme qui n’a pas la parole…

Cela me semblait important de montrer aussi une génération de femmes qui ne s’est pas autorisée à parler, [elle] qui se sent coupable de la mort de son mari.

C’est aussi un film qui se passe le tempsd’un été, Le Retour. Et c’est aussi cet été-là, pour ces deux jeunes femmes, le lieu de toutes les expérimentations…

Oui. J’avais envie que ce film soit, comme on peut dire, une espèce de film d’initiation où il se passe des choses pendant un été.

C’est Aïssatou Diallo Sagna qui joue Khédidja. Vous l’aviez déjà fait tourner dans La Fracture. Elle joue cette mère de famille qui subvient aux besoins de ses filles. Et puis deux jeunes actrices, qui crèvent un petit peu l’écran, Esther Gohourou et Suzy Bemba. Vous les avez trouvées comment ?

On a fait un casting très long avec Julie Allione, ma directrice de casting qui est vraiment quelqu’un qui aime beaucoup chercher des actrices non connues, dans la rue, des non-professionnelles. Malgré le placardage intensif qu’on a fait, on n’a pas eu autant de réponses que cela. Il y a une certaine population qui n’ose pas venir. Quand on dit qu’on cherche les filles de Aïssatou, on n’a pas autant de réponses que si, par exemple, on cherchait les filles de Virginie Ledoyen.

Vous aviez la volonté de montrer par ce trio de mère-filles, deux jeunes femmes noires, des choses qu’on ne voit pas au cinéma ?

Absolument. Je me suis dit : « Je suis à un endroit de mon travail où je peux travailler avec des acteurs les plus connus. »  Et comme j’ai un esprit à la fois rebelle, contradictoire ou punk, je me suis dit que j’avais envie, au contraire, de donner une chance à des jeunes gens. Et cela me fait un immense plaisir de renouer avec Aïssatou. J’ai été extrêmement surprise, ravie, heureuse de l’accueil du comité de sélection et de Thierry Frémeaux, le délégué général du Festival de Cannes, sur le film.

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