«L’Afrique dans la chanson gabonaise»: le regard du philosophe et diplomate Flavien Enongoué
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Quelle place pour l’Afrique dans l’œuvre des auteurs et interprètes gabonais ? C’est le thème d’un ouvrage collectif paru tout récemment aux éditions Descartes et Compagnie. Un livre supervisé par Flavien Enongoué, maître assistant de philosophie politique à l’Université Omar Bongo à Libreville et diplomate, puisqu’il est actuellement ambassadeur du Gabon à Rome, après avoir occupé ce poste à Paris. Cet ouvrage de plus de 300 pages, qu’il a supervisé, est intitulé L’Afrique dans la chanson gabonaise.

RFI : Comment est née l’idée de cet ouvrage collectif ?
Flavien Enongoué : En fait, quand j’étais à Paris, en mission, j’avais sollicité un certain nombre de spécialistes pour faire une compilation sur les auteurs musicaux gabonais qui ont chanté sur l’Afrique. Et cela n’a pas prospéré, mais comme je suis un auteur, je me suis dit autant s’orienter vers l’écriture. Et c’est comme ça que j’ai mobilisé un certain nombre d’universitaires pour finalement aboutir à cet ouvrage collectif L’Afrique dans la chanson gabonaise, qui est sorti deux ans plus tard.
Les artistes gabonais se sont-ils montrés réceptifs très tôt à l’idée africaine ?
Oui, à la différence des hommes politiques qui sont considérés comme portés vers le nationalisme, les auteurs musicaux gabonais se sont montrés très attentifs à l’idée africaine, et très tôt d’ailleurs puisque l’un des plus emblématiques d’entre eux, Pierre Claver Akendengué, a été considéré comme l’artiste africain par excellence.
Justement Pierre Claver Akendengué, c’est l’un des deux grands artistes auquel est consacré ce livre, parce que finalement il est question dans cet ouvrage de deux artistes prénommés Pierre Claver tous les deux.
La première partie porte effectivement sur Pierre Claver Akendengué, dont on connait des chansons emblématiques : « Awana W'Africa », « Africa obota », ainsi de suite. Et puis, il y a Pierre Claver Zeng qui a une chanson emblématique « Afrika », mais il y en a d’autres aussi parce que la troisième partie de l’ouvrage est consacrée à des auteurs comme Mackjoss, Annie Flore Batchiellilys, Aziz'Inanga, Alexandre Sambat. Puis, il y a des jeunes : par exemple, nous avons essayé d’avoir Lord Ekomy Ndong « Où sont les lions ». Et là, c’est le rap, le rythme vraiment nouveau.
Qu’est-ce qui caractérise cette chanson gabonaise aujourd’hui ?
Il est difficile d’avoir un marqueur identitaire qui puisse caractériser comme ça un peu la musique gabonaise. Il y a ce qu’on appelle la musique « tradi-moderne », qui s’appuie finalement sur des rythmes traditionnels, mais mélangés à des rythmes modernes comme la rumba, le makossa. C’est cette musique « tradi-moderne » qui est la marque de fabrique de la musique gabonaise.
Est-ce que les auteurs et les interprètes gabonais, comme Annie Flore Batchiellilys, sont reconnus à leur juste valeur dans leur pays ?
C’est un peu le problème qui est posé : la place de l’artiste, de la culture dans la société gabonaise. Quand on les entend, ce n’est pas évident parce qu’il y a les combats pour les droits d’auteur. Il faut être Pierre Claver Akendengué pour pouvoir sortir du lot. Il y en a d’autres, Patience Dabany, ainsi de suite. Mais, c’est un combat de longue haleine qui n’est pas simplement particulier au Gabon. Mais ces auteurs sont Africains non pas simplement parce qu’ils ont chanté africain, mais parce qu’une bonne partie d’entre eux ont été accueillis en Afrique. Le combat reste d'actualité, celui de (permettre aux) artistes de vivre de leur art, mais ils ne sont pas très nombreux (à pouvoir le faire) et c’est valable partout dans le monde.
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