La mystérieuse longévité du requin du Groenland
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Plongée dans les eaux glacées de l’Arctique pour éclaircir le mystère de l’exceptionnelle longévité du requin du Groenland, qui vit entre 300 et 400 ans, voir plus. De quoi fasciner la communauté des scientifiques, de plus en plus nombreux ces dernières années à tenter de comprendre par quels mécanismes ce poisson géant des abysses, qui peut atteindre jusqu’à 5 mètres de long, détient le record absolu de longévité chez les vertébrés.

Quatre siècles de vie sous la glace dans les profondeurs de l'Arctique. C'est le biologiste marin Julius Nielsen, de l'université de Copenhague, et son équipe qui, les premiers, dans une étude parue dans la revue Science en 2016, ont réussi à déterminer par datation au carbone 14 l'âge – non pas du capitaine – mais bien de 28 femelles requins du Groenland.
Le résultat est hallucinant : presque 400 ans pour la doyenne, la plus imposante avec ses 5 mètres de long, et 272 ans en moyenne proportionnellement à leur taille pour les autres. Une croissance aussi longue que lente, comme au ralenti par rapport aux autres espèces marines, qui a permis aussi aux chercheurs d'évaluer l'âge de la maturité sexuelle chez les requins du Groenland à 150 ans carrément.
Ce requin vit au ralenti
Plusieurs hypothèses sont à l'étude en ce moment, pour expliquer cette longévité inédite. La journaliste Élodie Papin, dans un article du Monde, a interrogé le professeur de biologie marine John Steffensen, de l'université de Copenhague, qui organise les expéditions scientifiques et éthiques pour étudier cette espèce classée vulnérable. Pour Steffensen, la première raison est à chercher dans la très basse température à laquelle vivent ces requins, à quelques centaines de mètres sous la banquise.
Contrairement aux mammifères, les requins adaptent la température de leur corps à leur environnement, en l'occurrence à -1,8°°C, qui est le point de congélation de l'eau de mer. Une température corporelle aussi basse ralentit considérablement le métabolisme du requin et les réactions chimiques et biologiques de ces cellules. De fait, le requin du Groenland est lent, très lent. « Même quand on le relâche, souligne Jefferson il s'éloigne tout doucement ». Une vie au ralenti, en quelque sorte, qui serait gage de longévité.
Quatre à six battements par minute
Cette lenteur concerne aussi son cœur. Le chercheur David McKenzie, du CNRS, a pu réaliser des électrocardiogrammes en plongeant des requins dans une piscine, sur le port de l'ile de Disko, au Groenland. Il a mesuré entre 4 à 6 battements par minute. Ce qui est un marqueur de longévité nécessaire, mais pas suffisant. D'autres animaux marins ont un cœur qui bat très lentement et n'atteignent pas pour autant ces âges canoniques.
Selon la chercheuse Holly Shiels professeur en science cardiovasculaire à l'université de Manchester, il faut aussi prendre en compte le mode de vie de ces requins dans les profondeurs de l'océan, sans prédateur et loin des humains. Il semble pourtant que ce requin du Groenland soit vraiment particulier, toujours selon cette professeure en sciences cardiovasculaires, qui a étudié leurs artères coronaires et découvert que celles-ci semblent totalement échapper au vieillissant, tout comme leurs cellules cardiaques.
Toujours plus fort, des chercheurs de cette équipe de l'université de Manchester se sont penchés sur le métabolisme des muscles du requin du Groenland qui, là encore, ne semblent pas comme chez les autres animaux, être sensibles au vieillissement. Une question de gènes peut-être. Le code génétique du requin du Groenland est aussi à l'étude pour tenter de percer les mystères de son métabolisme au ralenti et de son cœur qui ne vieillit pas, ou si peu, pendant plusieurs siècles.
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