L'Épopée des musiques noires

Hommage à Ahmad Jamal

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L’illustre pianiste Ahmad Jamal avait l’habitude de dire qu’il jouait la « musique classique américaine ». Le mot « jazz » ne lui seyait guère. Il voulait élever son art au rang des grands interprètes et compositeurs des temps anciens. Il y parvint sans mal puisqu’il fut l’un des artisans d’une forme d’improvisation unique que Miles Davis, lui-même, encensait. Ahmad Jamal nous a quittés le 16 avril 2023 à l’âge de 92 ans.

Le pianiste américain Ahmad Jamal au Royal Festival Hall, le 27 janvier 2014, à Londres.
Le pianiste américain Ahmad Jamal au Royal Festival Hall, le 27 janvier 2014, à Londres. © Redferns via Getty Images - Andy Sheppard
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Né à Pittsburgh, le 2 juillet 1930, Ahmad Jamal était un prodige. Il aimait souvent rappeler qu’il pianotait déjà à l’âge de 3 ans. Ses aptitudes feront sa renommée. Bercé durant toute sa jeunesse par les œuvres de Debussy, Liszt ou Ravel, il se nourrit de ces répertoires exigeants sans, pour autant, négliger les prouesses de ses contemporains Nat King Cole, Art Tatum, Erroll Garner… Son désir de se distinguer l’incite à former son propre trio. Au cœur des années 50, il convie Vernel Fournier et Israël Crosby à le rejoindre. Leur complicité fera le reste. Ahmad Jamal entre dans l’histoire grâce à un album enregistré en public dans le « Pershing Jazz Club » de Chicago, le 16 janvier 1958. Ce disque se vendra à plus d’un million d’exemplaires. 

Ahmad Jamal à Paris, en juillet 2019.
Ahmad Jamal à Paris, en juillet 2019. © Christian Rose

 

Jusqu’à la fin des années 60, Ahmad Jamal est célébré tel un orfèvre de la mélodie swing. Sa percutante délicatesse fait sensation mais dénote alors que le paysage musical s’oriente progressivement vers la pop-music. Les temps sont durs pour les pionniers qui peinent à susciter l’intérêt d’un public en pleine mutation. Ahmad Jamal reconnaîtra humblement avoir connu des moments difficiles mais jamais ne renoncera à créer, à composer, à magnifier ses œuvres. Il faudra cependant le coup de pouce d’un producteur français, Jean-François Debeir, pour que le nom d’Ahmad Jamal rejaillisse avec force au début des années 90. Dès lors, les enregistrements et les prestations sur les plus grandes scènes se multiplieront.

Ahmad Jamal sur scène, lors du Festival de Jazz à Nice, le 12 juillet 2011.
Ahmad Jamal sur scène, lors du Festival de Jazz à Nice, le 12 juillet 2011. © David Redfern/Redferns

 

Les amateurs de la première heure comme les nouveaux admirateurs acclament à nouveau à l’unisson ce septuagénaire fringant qui se félicite de ce regain d’intérêt pour sa virtuose agilité pianistique. À l’Olympia, au Palais des Congrès, au Théâtre de l’Odéon, à la Fondation Louis Vuitton, il reçoit les hourras chaleureux de spectateurs parisiens ébahis par tant de grâce, d’inventivité et d’énergie harmonique. Ahmad Jamal a émerveillé des foules entières pendant 70 ans. Son élégance, son toucher, ses mots choisis, son large sourire, sa sérénité, resteront l’empreinte indélébile de son apport culturel majeur aux XXè et XXIè siècles. 

 ⇒ Le site d'Ahmad Jamal.

 

 

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