Le grand invité Afrique

Industrie: «Il y a un enjeu de travail commun entre les pays africains et européens»

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« Venez investir en France. » C’est l’appel que lance le député français Charles Rodwell aux industriels africains, notamment à ceux qui ont développé, en Côte d’Ivoire ou au Nigeria, un savoir-faire technologique pour faire face au réchauffement climatique. Pour Charles Rodwell, plusieurs pays africains ont une avance technologique qui peut profiter à la fois aux Africains et aux Européens. Entretien.

Le député Renaissance Charles Rodwell lors d'une session de questions à l'Assemblée nationale, à Paris, le 16 mai 2023.
Le député Renaissance Charles Rodwell lors d'une session de questions à l'Assemblée nationale, à Paris, le 16 mai 2023. © AFP/Emmanuel Dunand
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RFI : En 20 ans, la France a perdu la moitié de ses parts de marché en Afrique, au profit notamment de l’Allemagne et la Chine, est-ce que c’est un déclin inéluctable ?

Charles Rodwell : Je ne crois pas. Je crois que c’est surtout une croissance, une expansion assez extraordinaire des pays du continent africain, avant tout. Si on a réduit nos parts de marché, c’est parce que les parts de ce marché, la croissance de ces pays s’est énormément élargie. 

Tout de même, depuis 30 ans, la France se désindustrialise, est-ce que ce n’est pas l’une des raisons du déclin de sa position économique en Afrique ?

Ce qui est certain, c’est que, pour exporter un produit, il faut d’abord le produire. Et les décisions politiques industrielles qui ont été prises en France sur les quarante dernières années… Et là, c’est sans clivage politique, ce sont des décisions prises par la droite, par la gauche, tous confondus… Ces décisions ont été catastrophiques. L’industrie dans le PIB français est passée de 20 à 10 % du PIB. C’est donc une catastrophe industrielle que l’on a connue, c’est la raison pour d’abord laquelle il faut produire pour les Français, pour notre propre population, mais aussi pour exporter partout dans le monde. Notamment dans les pays du continent africain, avec lesquels nous voulons continuer d’entretenir une relation extrêmement étroite, fondée sur une chose : l’entrepreneuriat et l’économie.

Est-ce qu’il y a des secteurs industriels dans lesquels la France peut se redresser dans les prochaines années et mieux exporter vers l’Afrique ?

Historiquement, la France et plusieurs pays du continent africain, les « moteurs » de ce continent, entretiennent des relations particulièrement étroites dans des filières comme l’agro-alimentaire, dans des filières comme l’énergie, des filières, comme dans certains pays, je pense au Maroc, de transport, de transport ferroviaire… Il faut qu’on aille beaucoup plus loin tout au long du 21e siècle.

Il y a les industriels français qui exportent en Afrique, mais il y a aussi les industriels africains qui peuvent exporter en France. Est-ce qu’il y a des opérateurs économiques africains qui peuvent avoir intérêt à implanter leurs usines en France ?

Mais j’en suis absolument convaincu et je vous remercie de notre échange ce matin qui me permet de lancer un appel à ces différents investisseurs et à ces différents chefs d’entreprises du continent africain, notamment de l’Afrique francophone, mais de l’Afrique en général : « Venez investir en France ! » La passion que j’ai pour plusieurs pays du continent africain vient du fait que j’y ai vécu, au Maroc, en Côte d’Ivoire. Je me suis rendu à de nombreuses reprises dans un très grand nombre de pays du Maghreb et d’Afrique sub-saharienne, notamment francophone. Quand je vivais dans les pays que j’ai mentionnés, il est évident de se rendre compte de l’avance technologique sur un certain nombre de sujets, sur des sujets auquel ces pays ont été confrontés avant nous. Je pense à un enjeu par exemple : dans le BTP (Bâtiment-Travaux Publics), les champions industriels du BTP africain ont développé des usages, des technologies qui sont parfaitement adaptés au réchauffement climatique, parfaitement adaptés à une hausse sans précédent des températures à laquelle nombre de ces pays ont été confrontés il y a plusieurs années et à laquelle nous sommes confrontés aujourd’hui. Ce savoir-faire technologique, ce savoir-faire industriel, porté par des champions nationaux, mais aussi des champions continentaux en Afrique, eh bien, nous, le message que nous pouvons leur lancer, c’est de venir investir en France pour y produire et pour partager avec nous leur savoir-faire.

Vous pensez à quel champion africain du BTP en particulier ?

Ils sont extrêmement nombreux. Quand on voit le savoir-faire au Maroc, en Côte d’Ivoire, des pays comme le Nigéria qui sont en pleine expansion économique, les pays comme le Ghana qui ont développé depuis très longtemps des usages et des technologies dans le domaine… Vraiment, je leur lance un appel général : sollicitez-nous et venez investir en France !

Vous vous félicitez, dans un rapport récent, que la France soit devenue la nation la plus attractive pour les investissements en Europe ? Mais, à quoi ça sert, Charles Rodwell, si c’est pour augmenter les importations en France et si c’est pour creuser encore plus le déficit de la balance commerciale française, qui dépasse les 100 milliards d’euros par an ?

En renforçant l’attractivité française, notre objectif, c’est tout l’inverse. C’est d’amener des investisseurs, des entrepreneurs, des industriels du monde entier, notamment du continent africain, à venir investir pour produire en France. Parce que, quand vous venez produire en France, vous avez accès à un marché qui est important, le marché français. Vous avez aussi accès à un marché important qui est le marché européen. Plus vous produisez sur le sol national, moins vous avez besoin d’importer : c’est tout l’enjeu du lien vers l’investissement dans notre pays. Oui, la France est l’un des pays les plus attractifs en Europe aujourd’hui, le premier depuis quatre ans. C’est la raison pour laquelle, en tant que député français, je crois vraiment qu’il y a un enjeu fondamental de travail commun entre les pays africains et les pays européens pour bâtir notre indépendance et notre sécurité économique au 21e siècle.

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