Amadou Ba (Pastef): «L’électeur sénégalais ne va pas se laisser tromper par une opposition en quête de rédemption et d'impunité»
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Au Sénégal, la bataille électorale est lancée, en vue des législatives du 17 novembre. Hier, à la même heure, vous avez pu entendre un porte-parole de l'ancien président Macky Sall, qui affirmait que « les Sénégalais commencent à regretter l'ancien régime, car le nouveau pouvoir ne fait rien ». Aujourd'hui, voici la réponse de ce nouveau régime, par la voix d'Amadou Ba, qui est député du Pastef. Combien de députés espère-t-il pour son parti dans la future Assemblée ? Quel risque prendrait Macky Sall s'il rentrait faire campagne au Sénégal ?

RFI : Monsieur Amadou Ba, le mois dernier, le chef de l'État a dissous l'Assemblée nationale, afin que les Sénégalais élisent une nouvelle Assemblée qui lui donnera les moyens d'agir, mais est-ce que vous ne craignez pas qu'un certain nombre de vos compatriotes, qui sont impatients de voir du changement, ne renoncent à voter pour le Pastef le mois prochain ?
Amadou Ba : Mais ils n'ont aucune raison de renoncer à voter pour le Pastef. Ils savent tous que le changement ne peut pas être immédiat. Après l'audit et la présentation catastrophique de nos fondamentaux économiques et sociaux, je pense que les Sénégalais comprennent enfin que cette exigence de vérité qui a été faite par les autorités montre une volonté de transformation radicale du système économique et social. Ça prendra le temps nécessaire. Mais dans l'immédiat, ce que je peux dire aux Sénégalais, c'est qu'il n'y aura pas, comme cela a été annoncé, il n'y aura aucune rupture, le paiement des salaires sera garanti et assuré, et les autorités s'engagent dans un délai très court à réduire la facture d’électricité et les prix des denrées de première nécessité ! Et ça, je parle du court terme. Bientôt, ça va baisser, parce que le gouvernement a trouvé une nouvelle stratégie, qui est de lui-même s'impliquer dans la chaîne de commande des denrées que les Sénégalais consomment et qui sont majoritairement importées. Déjà, nous allons encourager l'agriculture à fournir nos besoins primaires. Mais surtout, l'État va s'impliquer dans la chaîne de commande de ces denrées pour essayer de contenir les prix et empêcher les spéculateurs de s’engraisser sur le dos des Sénégalais. Donc à court terme, que ce soit dans l'électricité et les denrées de première nécessité, je pense que, si les Sénégalais donnent une majorité suffisante au Pastef pour supporter le gouvernement dans ses actions, ils verront les fruits de la nouvelle politique économique et sociale.
Le 17 novembre, est-ce que vous visez la majorité simple ou la majorité qualifiée ?
Nous avons besoin d'une majorité qualifiée, mais au-delà, je pense qu'il y a un exercice de cohérence qui est nécessaire et que l'électeur sénégalais, qui a porté le président Bassirou Diomaye Faye dès le premier tour avec 54%, ne va pas se laisser tromper par les chimères d'une opposition en quête de rédemption et d'impunité !
Donc, vous espérez la majorité des députés, voire la majorité qualifiée, c'est ça ?
Nous cherchons entre 110 et 115 députés minimum. Je pense que c'est un exercice de cohérence nécessaire. L'électeur sénégalais quand même ne va pas être amené par l'opposition à conférer, à ceux qui ont détourné les deniers publics pendant une dizaine d'années, le confort de l'immunité parlementaire et de l'impunité.
La majorité qualifiée, c'est combien de députés ?
C'est 99 députés et je pense que l'électeur sénégalais a la lourde responsabilité d'assainir l'espace politique et de plonger le Sénégal vers l'avenir.
Alors en face de vous, à ces législatives, il y a notamment 2 coalitions de l'opposition. Il y a « Jam Ak Njariñe » qui est conduit par l'ancien Premier ministre Amadou Ba, votre homonyme, et il y a « Takku Wallu Sénégal » qui est conduit notamment par Macky Sall et Karim Wade, est-ce que vous êtes sûr de battre des forces d'opposition représentées par des personnalités aussi fortes ?
Oui, des personnalités aussi fortes, mais qui ont les mains tachées de sang ou qui sont impliquées fortement dans des scandales financiers. Ces gens-là ne cherchent pas le suffrage pour représenter le peuple. Ils cherchent juste une immunité qui les protégera des poursuites qui certainement vont venir à la suite de leur gestion. Je pense que nous ne pouvons pas avoir peur de cette opposition-là, qui ne vise pas l'intérêt général, mais qui cherche à se protéger contre sûrement les poursuites judiciaires à venir. Ce qu'il faut savoir, c'est que l'électeur sénégalais ne va pas élire le Président Diomaye Faye au premier tour, et ne pas lui donner les moyens de concrétiser son projet. Ça n'a pas de sens et ce qui est important pour le Sénégal, c'est la stabilité retrouvée.
L'ancien président Macky Sall ne peut pas être arrêté avant une éventuelle mise en accusation par une future Assemblée nationale. Donc a priori aujourd'hui, il ne risque rien. Mais s'il rentre demain au pays, est-ce qu'il risque tout de même de perdre son passeport et de se voir interdit de sortie du territoire ?
Cette histoire de sortie de territoire a été réglée. Il n’y a plus d'interdiction de sortie de territoire. Le gouvernement a décidé de laisser la justice indépendante. C'est la justice qui avait décidé de lancer des interdictions de sortie. Mais il n'y a pas la main de l'exécutif derrière et ils le savent. Donc, le président Macky Sall ne risque rien. Aujourd'hui, il n'y a même pas de Haute Cour de justice installée à l'Assemblée nationale, elle ne peut pas se réunir, donc il peut venir battre campagne. Maintenant, justice se fera certainement après les élections législatives et il est présumé innocent jusqu'à ce qu'il soit impliqué ou mis en accusation par la Haute Cour de justice. Donc, je pense que, dans le Sénégal de demain, la rupture aussi, c'est de respecter les droits des opposants et les droits de l'opposition.
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