Les dessous de l'infox, la chronique

Nigeria: l’arrestation de Godwin Emefiele ciblée par la désinformation

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Au Nigeria, le nouveau président, Bola Tinubu, enchaîne les réformes chocs depuis son investiture. Parmi ces mesures, la suspension du gouverneur controversé de la Banque centrale du Nigeria, Godwin Emefiele, continue de faire du bruit. Ce proche de l’ancien président Muhammadu Buhari fait face à plusieurs accusations criminelles. Sur les réseaux sociaux, de fausses informations sont présentées comme des preuves dans le cadre d’une vaste campagne de dénigrement.

Depuis son arrestation, le gouverneur de la Banque centrale du Nigeria, Godwin Emefiele, est la cible de plusieurs vidéos détournées.
Depuis son arrestation, le gouverneur de la Banque centrale du Nigeria, Godwin Emefiele, est la cible de plusieurs vidéos détournées. © Captures d'écran/Montage RFI
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Des millions de dollars ont-ils été retrouvés chez Godwin Emefiele quelques jours seulement après son arrestation ? C’est ce que prétend montrer, à tort, une vidéo publiée sur les réseaux sociaux. Durant vingt-sept secondes, on y voit deux hommes en train de trier et de compter des centaines de liasses de dollars américains. À en croire la légende, cette scène montrerait la DSS, la police secrète nigériane, en pleine saisie au domicile de l’ancien gouverneur de la Banque centrale du Nigeria. Un récit fallacieux qui est massivement partagé sur Twitter, TikTok ou encore WhatsApp.

Cette vidéo détournée est omniprésente sur les réseaux sociaux.
Cette vidéo détournée est omniprésente sur les réseaux sociaux. © Captures d'écran/ Montage RFI

Après vérification, ces images n’ont rien à voir avec l’arrestation de Godwin Emefiele, ni même avec le Nigeria. Grâce à une recherche d'image inversée, on sait que cette vidéo a été filmée au Soudan en 2019. Selon des médias soudanais, elle montre une perquisition menée par les services de renseignement chez leur ancien président, Omar el-Béchir, où l’équivalent de plus de 100 millions de dollars avaient été retrouvés.

Une version confirmée par les images. En zoomant sur l’une des liasses de billets visibles au début de la vidéo, on remarque un bandeau blanc portant la mention « Central Bank of Sudan ». Questionné sur cette vidéo, le porte-parole de la police secrète nigériane a confirmé au média Legit qu’il s’agissait d’une infox.

La mention "Banque centrale du Soudan" est visible au début de la vidéo.
La mention "Banque centrale du Soudan" est visible au début de la vidéo. © Captures d'écran/ Montage RFI

Désinformer pour dénigrer

Cette infox n’est pas la seule visant à exagérer la richesse de Godwin Emefiele. Une vidéo montrant plusieurs voitures de luxe garées devant une maison a également été faussement attribuée à l’ancien banquier du Nigeria. Le narratif avancé est similaire, les véhicules auraient été trouvés au domicile de Godwin Emefiele après son arrestation. 

Cette vidéo sortie de son contexte circule beaucoup sur Tik Tok.
Cette vidéo sortie de son contexte circule beaucoup sur Tik Tok. © Captures d'écran/ Montage RFI

En réalité, la recherche par image inversée permet de retrouver cette même vidéo publiée le 10 juin 2023 dans un média nigérian. On y apprend que la scène montre la saisie par la police de plus de 40 véhicules chez Bello Matawalle, l’ancien gouverneur de l’État de Zamfara dans le nord du pays, et non pas chez Godwin Emefiele. 

Des infox à succès

Sur les réseaux sociaux, ces vidéos détournées de leur contexte sont particulièrement populaires. Elles cumulent plusieurs millions de vues sur TikTok et Twitter notamment. Pour s’en rendre compte, il suffit d’écrire Emefiele dans la barre de recherche TikTok. Les résultats mis en avant sont, en grande majorité, de fausses informations.

Ces infox ne sont pas un phénomène isolé au Nigeria. Elles s’inscrivent dans la continuité de ce que l’on a pu observer durant les élections générales, en février 2023, qui ont été gangrenées par la désinformation. Nos confrères de la BBC ont notamment montré comment les partis politiques nigérians ont secrètement payé des influenceurs pour diffuser de la désinformation sur leurs rivaux. Face à ce fléau, les journalistes locaux s’organisent et se structurent pour tenter d’enrayer la machine à infox.

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