Questions d'environnement

Comment expliquer la hausse des incidents entre humains et tigres en Inde ?

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L’Inde est saluée dans le monde entier pour avoir réussi à sauver les félins de l'extinction grâce à un ambitieux projet de protection. Mais ces derniers mois, les médias indiens se sont fait écho de tigres qui arrivent au cœur des villages et même dans les grandes villes.

Le « Projet tigre » vise à protéger le Tigre du Bengale en Inde
Le « Projet tigre » vise à protéger le Tigre du Bengale en Inde © commons.wikimedia.org
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Pas plus tard que le week-end dernier, un tigre s'est introduit dans la maison d'un responsable du Parti indien du Peuple dans le village de Sandana, dans l'Uttar Pradesh. Dans ce même État du Nord de l'Inde, un impressionnant mâle a créé un vent de panique dans la ville de Pilibhit, fin décembre. Parfois, ces rencontres entre la population et les tigres finissent tragiquement. Les données pour l'année dernière ne sont pas encore disponibles. Mais en 2022, 112 personnes sont décédées lors de « rencontres » avec des tigres. Ce chiffre est en constante hausse. En 2018, l'Inde ne comptait que 31 victimes. Deux États sont particulièrement concernés : l'Uttar Pradesh et le Madhya Pradesh, au centre du pays.

Le « Projet Tigre »

Pour expliquer ce phénomène, les spécialistes avancent plusieurs facteurs, et tout d’abord la croissance démographique indienne et l'augmentation du nombre de tigres. En 1973, la Première ministre indienne de l'époque, Indira Gandhi, avait mis en place le désormais célèbre « Projet Tigre » pour sauver ces félins majestueux de l'extinction. À l'époque, l'Inde ne comptait plus que 1800 tigres. Ils sont aujourd'hui environs 3500, soit les trois quarts de leur population mondiale. Pour arriver à ce résultat, les gouvernements indiens successifs ont instauré des réserves. Ces forêts protégées couvrent désormais 75 milles km², ce qui reste peu à l'échelle du pays.

Humains et tigres en concurrence pour l’espace et la nourriture

La déforestation - à cause de projets miniers, mais aussi de paysans, souvent pauvres, qui empiètent sur la surface forestière pour leurs activités agricoles, comme la culture de la canne à sucre — reste un problème majeur. Comme la construction de routes, elle fragmente voire détruit l’habitat naturel des félins. La plupart des incidents mortels entre humains et tigres ne se produisent pas dans des villages ou des villes, mais dans ou à proximité de la forêt, quand les éleveurs emmènent leur bétail paître dans les réserves ou encore quand les paysans s'aventurent dans la forêt à la recherche de bois pour cuisinier ou se chauffer.

Alors que depuis cinquante ans la protection des tigres de Bengale a été la fierté des Indiens, l'opinion publique en faveur de ces animaux pourrait-elle basculer ? Dans les villages ruraux situés à proximité immédiate des réserves, une certaine tension est palpable. À plusieurs reprises, les habitants ont bloqué des routes ces derniers mois pour exiger des autorités des mesures pour maintenir les tigres dans la forêt. Ils réclament des clôtures et davantage de patrouilles pour protéger les habitants et le bétail.

L'institution forestière et l'Autorité nationale pour la conservation des tigres misent au contraire sur des programmes de sensibilisation afin d'apprendre aux populations rurales à détecter la présence d'un tigre et les bons gestes à adopter en cas de face-à-face avec le félin. Et elles insistent : pour un tigre, un humain n’est pas une proie. La plupart des attaques sont accidentelles. D'ailleurs, si 500 Indiens sont morts ces huit dernières années en raison des félins, ils étaient 4 000 à perdre la vie en deux ans seulement à cause d’incidents avec des éléphants.

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