Soudan du Sud: le «Junub Open Space» d’Emmanuel Lobijo

Monter un incubateur de start-up dans un pays en guerre. C’est le pari réalisé par Emmanuel Lobijo, un jeune entrepreneur sud-soudanais. Longtemps réfugié, rentré dans son pays en 2009, il est l’initiateur du « Junub Open Space », spécialisé dans l’entreprenariat social. 

Vue aérienne d'une partie de Juba, la capitale du Soudan du Sud. (CC)/USAID/Wikipédia

C’est fin 2016 qu’Emmanuel Lobijo, 26 ans aujourd’hui, lance son incubateur. Quelques semaines plus tôt les combats ont repris dans la capitale, Juba. De nombreux jeunes quittent le pays. Mais pas lui. « J’ai été réfugié en Ouganda. Je sais ce que sont les conditions de vie dans un camp de réfugiés. Et je ne veux plus revivre ça. Donc, j’ai décidé d’utiliser mes compétences pour lancer le Junub Open Space. »

Cinq ans plus tard, son Junub Open Space accompagne des centaines de Sud-Soudanais : simple espace de rencontre pour entrepreneurs déjà aguerris ou véritable incubateur et centre de ressources pour d’autres, dans un pays où les besoins, et donc les opportunités, existent, mais où les obstacles sont nombreux. « L’un des défis, ce sont les taxes intempestives que nous réclament la municipalité, les services de sécurité ou d’autres. Il peut arriver qu’à la fin du mois, on te réclame plus d’argent encore que ton chiffre d’affaires. Plein d’entreprises ont dû fermer à cause de ça. »

Autre difficulté majeure : l’accès au capital. Pour contrer les réticences des banques à investir, Emmanuel a sa philosophie : commencer petit, avec ce que l’on a. « J’essaie toujours de démarrer avec des ressources disponibles. Par exemple, je vends des feuilles de Moringa. Je les cultive sur un petit espace dans mon arrière-cour, puis je les vends. Je n’ai pas de magasin, mais j’utilise les réseaux sociaux, c’est ça mon magasin. J’utilise également la crypto-monnaie et le bitcoin pour lever des fonds. Parfois, je lance aussi des collectes sur Twitter ou sur Flipstarter. »

Parmi les starts-up issues de cet incubateur : une entreprise de production de craie, une autre de production de savon. Plusieurs des projets soutenus par Junud Open Space ciblent plus particulièrement les femmes. C’est le cas du projet Janina. Garang Deng en est le responsable. « Avec ce projet, explique-t-il, on appuie des femmes agricultrices à se procurer des outils qui leur permettent d’avoir de meilleurs rendements et de s’adapter aussi aux conséquences des changements climatiques, pour sécuriser leurs productions et aussi avoir accès à des débouchés. ».