Reportage Afrique

Somalie: «On était obligé de s'enfuir», à Baidoa, l'afflux de réfugiés en quête d'aide [2/3]

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La Somalie connaît sa pire sécheresse depuis 40 ans. Selon l’ONU, elle a fait 1,2 million de déplacés et affecte presque 8 millions de personnes : soit la moitié des Somaliens. Reprise aux islamistes shebabs en 2012 par les forces gouvernementales et de l’Union africaine, Baidoa est l'épicentre de cette crise. La ville est un refuge pour des centaines de milliers de déplacés, qui s’y entassent dans l’espoir de recevoir de l’aide humanitaire inaccessible dans les zones sous le joug jihadiste.

Baidoa compte près de 500 sites de déplacés, ils encerclent littéralement la ville.
Baidoa compte près de 500 sites de déplacés, ils encerclent littéralement la ville. © AFP/Guy Peterson
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De notre envoyée spéciale à Baidoa,

« Regardez, ça, c'est du carton. Toutes de sortes de matériel récupérées ici et là, mais ça ne suffit pas à nous protéger. ». Safi Ishab Ibrahim nous montre avec dépit la petite hutte de fortune où elle s’abrite depuis 1 mois avec sa fille et 3 trois petits enfants. 

« Voilà, c’est ça ma maison. C’est là que je dors. Les voisins m’ont aidé à la bricoler », indique-t-elle. « Mais je n’ai pas de lit, rien. On survit comme ça. Et nous manquons de nourriture. » Safi a fui la sécheresse, la faim. Dans son village à 50 km de Baidoa, le manque de pluie a eu raison de tout : récoltes, bétails et puits. « On a déjà connu des sécheresses, mais celle-ci, c’est la pire. Il n’y avait absolument plus rien dans le village. On était obligés de s’enfuir. »

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Devant elle, une gamelle à moitié vide, l’unique repas de la journée. « C’est de la bouillie de sorgho. J’ai préparé ça grâce à ce que m’a donné la communauté. On n’a même pas ça tous les jours. »

La ville de Baidoa encerclée par les déplacés

Baidoa compte près de 500 sites de déplacés, ils encerclent littéralement la ville. Les derniers arrivés s’entassent où ils peuvent. Hafsa est venue ici en 2017 lors d’une précédente sécheresse. Elle peinait déjà à s’en sortir, d’autant qu’en octobre dernier, elle a dû accueillir sa sœur et ses enfants. 

« Ses enfants plus les miens, ça fait maintenant 14 enfants. Six pour moi, huit pour elle. C’est une pression supplémentaire, la nourriture coûte cher. Mon mari fait des petits travaux journaliers sur le marché. C’est vraiment difficile de trouver l’argent pour acheter à manger. »

Une crise qui est loin d’être terminée

À son arrivée, Hafsa avait bénéficié de l’aide de l’ONG Acted. Mais les ressources manquent pour faire face à ces cycles de sécheresse répétés, la troisième en 10 ans. Les humanitaires parent au plus pressé. Hassan Ali directeur de projet adjoint chez Acted.

« Ici aussi, on a des pénuries en eau. Dans les villages, tout est à sec, alors les gens recherchent de l’aide et c’est pour ça qu’ils se déplacent à Baidoa. Dans les sites de déplacés, on fait venir de l’eau par camions, et rallonge des pipelines. Mais ce ne sont pas des solutions durables, nous ne pouvons pas faire venir de l’eau par camion-citerne indéfiniment, car cela coûte de l’argent. Il faut des financements. La situation est vraiment imprévisible ici et on fait face au jour le jour. » 

Car la crise est loin d’être terminée. En octobre, il a plu un peu à Baidoa, mais pas assez. Et les prévisions sont mauvaises : les météorologues s’attendent à ce que la prochaine saison des pluies, prévue en mars, soit également ratée.

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