Reportage Afrique

Kenya: quel accès à la santé pour les jeunes marginalisés?

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Une partie de la population de Mombasa, deuxième ville portuaire la plus importante du Kenya, à majorité musulmane, est marginalisée dans l’accès aux soins de santé. C’est le cas notamment des jeunes vivant à la rue, des travailleurs et travailleuses du sexe, des personnes transgenres ou autres minorités sexuelles. Une exclusion qui a des conséquences sur leur santé, notamment sexuelle et reproductive. Médecins sans frontières, en collaboration avec le département de la Santé du comté de Mombasa, tente de combler cette carence. 

Des dispensaires éphémères sont installés pour les populations marginalisées de Mombasa.
Des dispensaires éphémères sont installés pour les populations marginalisées de Mombasa. © AFP/Simon Maina
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De notre correspondante de retour de Mombasa,

Quelques chaises et tables en plastique. Des espaces de consultation derrière des rideaux. Et du personnel de santé aux petits soins. Pour quelques heures, cette place du quartier populaire de Ganjoni à Mombasa a été transformée en dispensaire éphémère.

« Le thème principal du jour, c’est la contraception et l’hygiène menstruelle », relate Caroline Mugun, infirmière, responsable des activités médicales pour MSF. « Ici, le clinicien peut recevoir le patient et avoir une consultation en privé. Aujourd’hui, nous avons fait pas mal de dépistages du cancer du col de l’utérus, des retraits d’implants contraceptifs et d’injections de contraceptifs longue durée, ce qui correspondait à des demandes que nous avions reçues. »

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« Nous arrivons à déconstruire »

Les soins sont gratuits pour les patients âgés de 10 à 24 ans. Venir directement au contact d’une jeunesse marginalisée, c’est l’objectif de cette délocalisation. 

« Ce lieu est très stratégique parce qu’il y a beaucoup de personnes à la rue, de toxicomanes et de travailleurs et travailleuses du sexe. Ces personnes ont souvent peur d’aller dans certains centres de santé où il y a beaucoup de stigmatisation », explique Caroline Mugun. « En voyant par exemple un homme qui a des relations sexuelles avec des hommes, certains cliniciens peuvent se dire “ma religion ne valide pas ça”, ou alors, il y a une peur de devenir séropositif, d’être converti… Tout ça, au final, ce sont des appréhensions personnelles liées à un manque de connaissances, mais dès que nous échangeons avec eux, nous arrivons à les déconstruire. »

« À l’hôpital, je ne me sens pas bien traitée… »

Husna Aisha est venue chercher des contraceptifs et faire des tests de dépistage de maladies sexuellement transmissibles. Âgée de 23 ans, elle est travailleuse du sexe depuis sept ans, après s’être retrouvée à la rue au décès de ses parents. Mère de quatre enfants, la jeune femme privilégie désormais ces espaces adaptés à ses besoins. 

« À l’hôpital, je ne me sens pas bien traité. Ils disent “Ah... Husna est travailleuse du sexe, elle est jeune, pourquoi elle fait ça, elle devrait être à l’école”. Je me sens humiliée, je n’aime vraiment pas la façon dont je suis reçue », ressent Husna Aisha. « Donc même si j’attrape le VIH, je préfèrerais ne pas y aller, il y a trop de discriminations de la part des médecins. Alors qu’ici, c’est plus privé, ne serait-ce que parce que les cliniciens viennent directement là où nous sommes. »

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Avec ces actions, MSF et le comté de Mombasa espèrent reconnecter ces jeunes marginalisés au système de santé. Quelques dispensaires de la ville offrent aussi désormais des services adaptés avec du personnel sensibilisé aux vulnérabilités de cette jeunesse.

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