Reportage Afrique

Diasporas africaines à Dubaï [2/3]: Mohamed et le défi de l’identité

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À l’approche de la COP 28 qui se tient du 30 novembre au 12 décembre à Dubaï, RFI vous propose d’aller à la rencontre des diasporas africaines installées dans la capitale économique des Émirats arabes unis. Des petites mains aux cadres supérieurs en passant par les entrepreneurs : les Africains sont de plus en plus nombreux à vivre dans l’émirat. Aujourd’hui, le deuxième épisode de notre série : Mohamed et le défi de l’identité.

La terrasse d'observation du port de Dubai, aux Émirats arabes unis, pour admirer les toits de la ville avec la plus haute tour du monde, la Burj Khalifa. (Image d'illustration)
La terrasse d'observation du port de Dubai, aux Émirats arabes unis, pour admirer les toits de la ville avec la plus haute tour du monde, la Burj Khalifa. (Image d'illustration) AP - Kamran Jebreili
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C’est entouré de ses deux chatons blancs que Mohamed nous accueille dans son appartement. Avec sa voix rauque et sa carrure imposante, ce Soudanais de 39 ans surnommé « Beegee » s’est fait une petite renommée dans le milieu de l’évènementiel à Dubaï. Il raconte son parcours : « Je viens du Soudan, mais je suis né et j’ai grandi ici aux Émirats. À Sharjah plus précisément, et après, on a déménagé à Dubaï. Mon père est venu ici depuis le Soudan, mais avant ça il était à Beyrouth. À cause de la guerre civile, il a dû rentrer au pays puis trouver un travail ici aux Émirats en 1976. »

« Comme un extraterrestre qui a perdu sa planète »

Comme ses parents, nombreux sont les Soudanais à avoir migré à Dubaï dès les années 1970 pour fuir des « situations malheureuses », comme le dit Mohamed. Bien souvent, ils ont occupé des postes d’enseignant ou encore de médecin. La culture islamique commune, mais aussi la langue qu’ils partagent, ont facilité leur intégration. Mais pour leurs enfants, tout n’a pas été facile.

En cause, le sentiment d’appartenance à un pays qui les a vu naître et grandir, mais auquel ils n’appartiennent pas non plus complètement. Mohamed connaît bien ce sentiment antinomique : « Disons que je me sens comme un extraterrestre qui a perdu sa planète. C’est ce que je dirais. Je n’appartiens pas vraiment à mon pays, le Soudan. Parce que là-bas, je suis comme un touriste. Et ici, je connais tout de A à Z, j’appartiens au pays, mais je ne suis pas Émirien. C’est un gros problème au Moyen-Orient. Même s’ils te traitent comme la famille, qu’ils prennent soin de toi, encore une fois, c’est une question d’identité. »

Partagé entre son lieu de vie et son héritage culturel

Aux Émirats, obtenir la nationalité est un véritable casse-tête quasi impossible à résoudre. Sans ce passeport, son visa de résidence de trois ans pourrait très bien ne pas être renouvelé. Les parents de Mohamed l'ont donc toujours poussé vers ses racines soudanaises. Comme une bouée de sauvetage en cas de malheur : « Ma mère mettait toujours ce parfum, l’encens à la maison. Le vendredi, on mettait la musique soudanaise. On voyageait souvent au pays aussi. La nourriture, tout ça. C’est toujours ici dans mon sang. Je comprends ce que c’est le Soudan, je connais la culture. Je connais tout ça. L’identité est en moi. C’est dans mon sang, ma couleur de peau. Mais comme je te l’ai dit, la terre, c'est la terre. »

Mohamed n’est pas retourné au Soudan depuis 2019. Ses plans de vacances ont été contrariés, d’abord par la crise sanitaire mondiale, puis par la guerre qui sévit dans le pays depuis le début d’année.

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