Reportage Afrique

À Madagascar, une bibliothèque de rue donne le goût de la lecture aux plus défavorisés

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Dans un des quartiers très populaires de la capitale Antananarivo, une association malgache propose tous les samedis matin depuis 2016 une bibliothèque de rue itinérante destinée aux enfants défavorisés. Une association convaincue que la lecture et l’écrit peuvent être d’incroyables vecteurs d’ascension sociale.

Au milieu des maisons de fortune dans le quartier d'Anosibe, des animateurs, une bâche et des livres suffisent à créer une formidable bibliothèque de rue, tant plébiscitée par les enfants que leurs parents. Les lecteurs du jour ont entre 1 et 17 ans.
Au milieu des maisons de fortune dans le quartier d'Anosibe, des animateurs, une bâche et des livres suffisent à créer une formidable bibliothèque de rue, tant plébiscitée par les enfants que leurs parents. Les lecteurs du jour ont entre 1 et 17 ans. © Sarah Tétaud/RFI
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Reportage de notre correspondante de retour d’Anosibe

« Qui a écrit ce livre ? (...) Quel est le titre du livre ? (…) Bravo ! » La bruine qui s’abat ce samedi matin sur le quartier boueux et malodorant d’Anosibe n’a pas effrayé la soixantaine d’enfants venue participer à l’atelier lecture. Ils ont entre 1 et 16 ans. Serrés les uns contre les autres, en tailleur sur la bâche dépliée pour l’occasion, ils écoutent, attentifs, le conte malgache lu par une des bénévoles de l’association Boky Mitety Vohitra (« Bibliothèque des rues » en français).

« Ici, il y a beaucoup d’enfants non scolarisés, préciseMarie Michelle Razafintsalama, la présidente de l’association, à l’origine de cette formidable initiative. Je suis persuadée qu’on peut acquérir les connaissances sans être allé à l’école. Et c’est pour ça que je crois en cette activité, pour que les enfants puissent avoir les connaissances, les savoirs, apprendre l’éducation, le savoir-vivre, à se respecter. »

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Les filles représentent 50% des lecteurs

Après la lecture commune, vient enfin le temps de lecture libre. C’est la ruée sur les livres. L’animatrice tempère : « chaque enfant choisit un livre qui lui plaît. Venez, venez ! Hé hé, asseyez-vous ! » Malgré le bruit ambiant, Malala, 14 ans, se plonge dans sa bulle et dévore les trois livres qu’elle a choisis : « Moi, je n’ai pas de livre à la maison. Tous les samedis, il y a la bibliothèque qui vient. Des fois, c’est dans d’autres quartiers, alors je me déplace : je viens à chaque fois. J’aime lire des livres, parce qu’il y a beaucoup de choses à découvrir. Je rêve de pouvoir lire plus, mais au quotidien, je me contente de mes cahiers d’école pour m’évader. »

Victor, un papa, passe dans le quartier et reconnaît sa fille, assise au milieu des enfants, absorbée dans sa lecture : « Moi, je n’ai pas eu l’opportunité d’aller à l’école. J’ai passé toute mon enfance à mendier jusqu’à ce que je devienne tireur de charrette. Alors quand j’apprends que la bibliothèque vient ici, j’encourage ma fille à y aller. On a vraiment de la chance qu’ils soient là, ces bénévoles. Je dis à Tiana : "Sois attentive, écoute bien ce qu’ils vont t’apprendre, ça t’aidera à aller loin". » 

Aller loin, Marie-Michelle l’espère. Elle a aussi et surtout réussi à sensibiliser les familles pour laisser les filles venir à la bibliothèque de rue et les éloigner le temps de deux heures par semaine, des corvées du foyer. Elles représentent désormais 50% des lecteurs. Une belle victoire pour l’association.

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