Nigeria: paroles d'anciennes filles de Chibok, 10 ans après leur enlèvement
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Dans la nuit du 14 au 15 avril 2014, 276 lycéennes âgées entre 15 à 18 ans, pour la plupart chrétiennes, étaient enlevées dans leur internat public de Chibok par le groupe armé Boko Haram. Alors qu'elles faisaient la une de l'actualité dans le monde entier il y a encore sept ans, les filles de Chibok sont retombées dans l'oubli depuis, avec la banalisation des enlèvements de masse au nord-est et surtout dans le nord-ouest du Nigeria. Témoignages d'Amina Nkeki et Jummai Metuh, qui ont vécu ce spectaculaire kidnapping d'avril 2014, puis plusieurs années de séquestrations.

De notre envoyé spécial à Yola,
Dans son logement une pièce de Yola, Amina Nkeki apprécie la liberté d'élever sa fille Patience, née en captivité d'un père membre de Boko Haram. Bénéficiant d'une aide fédérale, Amina a trouvé son équilibre en reprenant ses études. Mais les enlèvements en 2024 dans des écoles du nord-ouest du Nigeria replongent Amina dans un cauchemar sans nom.
« Les enlèvements et les séquestrations se poursuivent dans ce pays. N'y a-t-il pas de dirigeants dans ce pays ? Ils ne prennent aucune mesure pour lutter contre l'insécurité. Je ne cesse de me demander quand tout cela va s'arrêter. »
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« J'ai pardonné aux membres de Boko Haram »
Pour Jummai Mutah, chaque enlèvement de masse est une douloureuse épreuve. Maman d'une petite Zoey, elle est soulagée de vivre en sécurité à Yola, loin de Chibok, toujours sous la menace de Boko Haram. Pourtant, Jummai confesse ne plus en vouloir aux responsables de sa séquestration :
« J'ai déjà pardonné aux membres de Boko Haram. Mais Dieu dit de pardonner et d'oublier. Certes, j'ai pardonné, mais quant à oublier... Je demande encore à Dieu pour qu'il me fasse oublier tout le passé. Car je sais que même si je dis que je pardonne, je ne peux pas oublier. »
La quête de paix sans passer par la Justice
Jummai se rmémore encore la forêt de Sambisa et la dramatique malnutrition durant sa captivité. Aujourd'hui remise physiquement, Jummai se sait fragile mentalement. Pour être en paix, elle n'envisage pas de recourir à la justice pour réparer ses années de jeunesse perdues :
« Nous ne sommes pas les seules à avoir connu ce genre de situation au Nigeria. Je sais que la justice fait son travail. Mais même si j'essaie, je ne pourrais pas gagner un procès. Alors, que puis-je faire ? »
Et comme Amina, l'école est la rare institution nigériane à laquelle Jummai croit encore. Dans deux ans, elle compte bien inscrire sa petite Zoey en maternelle.
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