Reportage Afrique

Centrafrique: à Kaga-Bandoro, des personnes handicapées s'émancipent grâce à l'agriculture [1/4]

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En Centrafrique, certains handicapés de Kaga-Bandoro, au centre du pays, pratiquent l'agriculture. Ils ont créé il y a trois ans le groupement Wanzin en langue locale qui signifie « handicapé ». Ces personnes ont perdu un membre suite à une maladie, un accident ou une blessure de guerre. Même si c'est un travail difficile, ce n'est pas impossible pour ces hommes et femmes qui cultivent avec des béquilles ou dans des fauteuils roulants. 

Le groupement WANZIN produit du maïs, du manioc, du sésame et de l'arachide.
Le groupement WANZIN produit du maïs, du manioc, du sésame et de l'arachide. © RFI/Rolf Steve Domia-Leu
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De notre correspondant de retour de Kaga-Bandoro,

C'est avec son vélo à trois roues qu'Aboubacar sillonne les couloirs étroits de son champ de manioc. Le dos courbé, il se penche sur le côté et laboure le sol avec la houe. Avec fierté, Aboubacar utilise sa main droite pour conduire son vélo et l'autre pour labourer : « J'ai été victime de la poliomyélite à l'âge de 4 ans et je n'ai pas eu la chance d'aller loin dans les études. Aujourd'hui, j'ai 28 ans et je pratique l'agriculture pour gagner ma vie. Le travail est pénible sur un tricycle. Mais avec le courage et la détermination, on avance. »

Le groupement Wanzin produit du maïs, du manioc, du sésame et de l'arachide. Dans les différents couloirs de la plantation, chacun dans son tricycle, les agriculteurs désherbent la terre pour débarrasser le champ de ses plantes indésirables. Marius se sent épanoui, dit-il, en faisant ce travail : « Certains d'entre nous ont été amputés à la suite à un accident et d'autres ont perdu une jambe lors du dernier conflit armé. Ce sont des choses qui arrivent, mais régulièrement, nous sommes stigmatisés et marginalisés. Nous voulons, à travers ce groupement, être enfin libres et indépendants. » 

Mais pour ces personnes handicapées, se procurer un tricycle reste un véritable challenge. À Kaga-Bandoro, il faut débourser entre 180 000 et 200 000 francs CFA, près de 300 euros. Ce bijou n’est pas à la portée de tous les agriculteurs handicapés. Accroupie dans un champ de carottes, Marie-Claire travaille depuis l’aube en rampant : « Comme vous voyez, je n'ai ni tricycle, ni prothèses. J'ai des béquilles, mais pour cultiver aisément, je dois ramper dans le champ. Je suis passionnée par l'agriculture et c'est ce qui me permet de vivre. »

Cultiver avec un vélo à trois roues demande beaucoup d'efforts. Ali, par exemple, a quitté son travail d'agent de sécurité après un accident de la route pour se reconvertir dans l'agriculture : « Chaque année, on cultive environ cinq hectares. J'ai un handicap, mais ce n'est pas la fin du monde. L'année dernière, nous avons cultivé cinq tonnes de produits alimentaires. Ce qui nous a rapporté 4 millions de francs CFA. Cet argent nous permet d'acheter des tricycles à ceux qui n'en ont pas et de payer les salaires de nos membres. »

Le groupement Wanzin commercialise également ses marchandises dans d'autres régions de la République centrafricaine et même dans la sous-région, notamment au Tchad et au Soudan.

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