Reportage culture

«Barvalo», ou les cultures romanies en exposition à Marseille

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À Marseille s'est ouvert cette semaine et jusqu'au 4 septembre une exposition sur ceux que l'on appelle improprement les roms, les gitans ou les tsiganes et qui préfèrent le terme de communautés romanis. Ils exposent leur richesse et leur histoire au Mucem, le Musée des civilisations d'Europe et de la Méditerranée. Un événement qui vise à déconstruire les stéréotypes et qui s'intitule «Barvalo».

Delaine Le Bas, «The World of Gypsy romance», 2009.
Delaine Le Bas, «The World of Gypsy romance», 2009. © Olivier Rogez / RFI
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« Barvalo ». Un mot qui signifie à la fois richesse et fierté, c'est le terme choisi par l'une des cinq commissaires, Julia Ferloni, pour intituler cette exposition. « On voulait pour l'exposition quelque chose qui témoigne de la fierté des populations romanies. Et la langue romani en est un exemple. Une langue standardisée, enseignée à l'université. Il y a des poètes et des écrivains », indique la commissaire.

Tout aussi important le projet. Dépasser les stéréotypes, l'exotisme, la stigmatisation de ceux que l'on appelle péjorativement Tsiganes, Gitans, Manouches et qui préfèrent le terme de Romani. Pour cela, Jonah Steinberg, anthropologue et initiateur de cette exposition, a composé un comité scientifique majoritairement romani avec des chercheurs, artistes et militants. « Trop souvent, les représentations des populations romanies ont été faites par des autres, sans la voix des populations romanies », dit-il.

Quelque 200 œuvres et documents sont présentés. Des artistes ont été mis à contribution. Parmi eux, Gaby Jimenez. Il a créé un musée du gadjo, le gadjo étant une personne non-romani. Drôle et grinçante, cette œuvre est le miroir du racisme. « Moi, j'ai inversé ce miroir-là en recréant de toutes pièces une culture, qui s'appelle la culture des gadjés. De la préhistoire à sa sédentarisation. En créant des stéréotypes autour de faits quotidiens. Il boit du vin, il mange du pain, il utilise des outils en pierre. Il a inventé le feu avec des allumettes. Beaucoup d'humour dans ce musée-là... »

Les Romanis, négligés par l'Histoire

L'exposition se veut historique. Une histoire qui a trop souvent négligé les Romanis. Au grand regret de la foraine et militante, Sylvie Debart. « Quand mon grand-père est allé se battre sous les drapeaux, il n'était pas majeur. Il avait falsifié ses papiers d'identité pour pouvoir combattre. On ne lui a pas dit 'toi, le p'tit gitan, tu rentres chez toi'. Et après, quand ils ont été démobilisés, ces gens-là, on les laisse sur le bord de la route. Ils n'ont plus de caravanes, ils n'ont plus de chevaux. Et on s'aperçoit que nos parents, nos grands-parents qui ont combattu, ne sont pas reconnus alors qu'ils ont aidé à sauver la France. » 

La mémoire des peuples romanis est une longue suite de persécutions. L'exposition revient sur l'Holocauste nazi. Des centaines de milliers de déportés. Peut-être même un million de morts, selon certains historiens. Anna Migra-Kruszelnicka est directrice adjointe du European Roma Institute for Arts and Culture, associé à cette exposition.

« Quand la guerre s'est terminée, la plupart des mécanismes, y compris les lois qui nous avaient envoyé dans les camps de concentration, ont perduré. Et ce n'est qu'au milieu des années 1980 que les autorités allemandes ont reconnu leur responsabilité dans l'holocauste des Romanis. »

Arrivés d'Inde il y a dix siècles, les Romanis sont entre dix et douze millions de personnes disséminés en Europe. Et, dernier stéréotype qui tombe, l'immense majorité est sédentaire.

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