Reportage culture

«The Survival Of Kindness», quand la vie de l'actrice Mwajemi Hussein inspire le cinéaste Rolf de Heer

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Un conseil cinéma : The Survival Of Kindness, c'est le titre du nouveau film de Rolf de Heer, un cinéaste australien qui s'est illustré ces dernières années en faisant tourner des acteurs aborigènes. Cette fois, il dirige une comédienne originaire de République démocratique du Congo dans un film totalement inclassable, récompensé au dernier festival du cinéma de Berlin où il a obtenu le prix de la critique internationale.

« The Survival Of Kindness » est porté par l'actrice australienne d'origine congolaise Mwajemi Hussein.
« The Survival Of Kindness » est porté par l'actrice australienne d'origine congolaise Mwajemi Hussein. © Nour Films
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À l'origine de ce nouveau film, il y a une vision entêtante qui obsède le réalisateur Rolf de Heer. « C'était l'image d'un de mes amis, l'acteur aborigène Peter Djiggir, enfermé dans une cage sur une remorque et abandonné à la mort dans le désert. Pourquoi cette image ? Je n'en sais absolument rien. J'ai donc cette image d'ouverture, j'ai en tête cette période de pandémie. Et puis j'étais horrifié par les déclarations de certains politiciens occidentaux qui se réjouissaient que le Covid tue des Noirs et des personnes de couleur. Et cela me conduit à ce film. »

Le cinéaste australien de 72 ans garde l'image d'un être noir en cage, mais ce sera finalement une femme qui interprète le rôle principal de son 16e film. Une œuvre inclassable, entre western, roadmovie à pied ou film d'horreur, où l'héroïne quinquagénaire, qui a réussi à se libérer de sa cage, erre dans un univers post-apocalyptique dont on ne connaît pas les ressorts.

« La crise transcende les fractures raciales. On apprend progressivement qu'il faut porter un masque à gaz pour rester en vie. Mais les personnes racisées n'ont pas le droit d'en porter sinon elles se font tuer. »

Un film porté par le vécu de son actrice principale

Ce film sans paroles tient beaucoup à la présence de l'interprète principale. Mwajemi Hussein n'est pourtant pas une comédienne professionnelle. Mais Rolf de Heer a décelé en elle une force liée à son passé.

« Elle est née en République démocratique du Congo et a été violée à 13 ans par un oncle dont elle est tombée enceinte. On l'a envoyée dans un autre village, mais à son retour son père a été tué pour ne pas avoir révélé où elle était. Puis la guerre a éclaté, et après mille péripéties, elle a vécu avec ses six enfants pendant huit ans dans un camp de réfugiés en Tanzanie. Donc sa vie est remplie de malheurs, et c'est cette humanité qu'elle exprime si bien dans le film. »

On peut considérer le titre de ce film, The Survival Of Kindness (La survie de la bonté), comme ironique. Ou bien le prendre au premier degré. Rolf de Heer raconte en tout cas que lorsque son actrice principale, marquée par des années de tourment au Congo puis dans un camp de réfugiés, a entendu ce titre, elle a éclaté en sanglots tant il faisait écho à sa propre survie.

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