En Thaïlande, le sport national, la boxe thaïe, ou muay thai, se féminise peu à peu. Le stade le plus prestigieux du pays a accueilli au mois de septembre le premier combat féminin de son histoire. Malgré le succès des boxeuses thaïlandaises sur la scène internationale, les résistances sont fortes dans le milieu de la boxe, où des superstitions tenaces empêchent encore les femmes d’occuper un rôle central.

De notre correspondante à Bangkok,
Le moment était historique. Le 18 septembre dernier, le prestigieux stade Lumpinee, à Bangkok, accueillait son premier combat féminin. Les combattantes ont d’abord effectué le way kruu, une série de mouvements chorégraphiés, destinée à mettre en valeur leur souplesse et leur grâce, des qualités également requises des boxeurs masculins. Et, c’est la jeune Sanechan, 17 ans, qui est sortie victorieuse.
Mais si la discipline se féminise peu à peu, de nombreuses superstitions régissent encore la présence des femmes. Par exemple, au contraire des boxeurs qui enjambent les cordes pour rejoindre le ring, les femmes sont contraintes à se courber pour passer en dessous.
Pour la championne Biamouali Sep, la pratique est humiliante pour les boxeuses.
« C’est au cas où une femme aurait ses règles ce qui est considéré comme porte-malheur. En plus, on est toutes considérées comme toutes lesbiennes, ce qui est mal vu. Mais franchement, ils pourraient au moins nous laisser passer en dessous de la deuxième corde, au milieu, au lieu de nous faire carrément ramper sous la dernière. »
Les croyances autour du pouvoir maléfique des règles et des parties intimes du corps féminin sont tenaces en Asie du Sud-Est, accusées de faire perdre leur pouvoir de protection magique aux tatouages des hommes et aux incantations des moines. Les légendes autour des malheurs engendrés par les femmes sur le ring pullulent, même à l’époque moderne.
Boxeuses transsexuelles sont mieux acceptées
L'ancienne reporter sportive Suwanna srisongran, raconte qu’un soir, une infirmière a fait prendre des risques inconsidérés aux boxeurs.
« Ce soir-là, elle était venue assister le médecin du ring, qui n’était pas encore arrivé. Mais elle ne connaissait rien au monde de la boxe, aux croyances, aux cérémonies des moines. Personne ne lui avait expliqué, et tout à coup, l’un des boxeurs est blessé à la tête, alors elle se précipite sur le ring, en enjambant les cordes, pour le soigner. À partir de là, ça a été l’hécatombe. Ce soir-là, plus de 10 boxeurs ont été gravement blessés. »
En conséquence, les boxeuses transsexuelles sont mieux acceptées que les boxeuses nées femmes. C'est le cas de la championne Nong Toom, devenue icône nationale, qui a pu finalement s’offrir une chirurgie de changement de sexe après des années de combat contre des hommes sous une apparence féminine.
Les clichés ont la vie dure, mais grâce à leur succès sur la scène internationale et avec l’espoir de voir la boxe thaïe bientôt en compétition olympique, les boxeuses, combat après combat, gagnent la considération du public thaïlandais.
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