Santé: les enjeux du décryptage de l'ADN africain
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Quels sont les secrets que pourrait livrer une meilleure connaissance de l’ADN africain ? Cette question, de plus en plus de chercheurs et de scientifiques se la posent à travers le monde. La diversité génétique sur le continent est la plus riche du monde. Pourtant, l’ADN africain représente à peine 2 % des bases de données génétiques existantes.

De notre correspondante à Palerme,
Les Africains noirs représentent près de 17 % de la population mondiale. Mais seulement 2 % des sujets participant aux études génétiques sur lesquelles s’appuient la littérature scientifique et les recherches médicales.
Ce manque de données a des conséquences directes pour les scientifiques, détaille Jenniffer Maroa, une consultante indépendante kényane. « On ne peut pas répondre à toutes les questions que l’on souhaiterait parce qu’on manque de financements et de scientifiques qui collectent ces données, or elles sont indispensables pour assembler les pièces du puzzle. La diversité en Afrique est immense. Si l’on n'a qu’une petite part de ces données, c’est comme si l’on voulait faire un puzzle alors qu’il nous manque des pièces », explique-t-elle.
Diversifier sa base de données pour des médicaments plus efficaces
Prenons par exemple un gêne appelé PCSK9 indispensable à la régulation des lipides dans le sang. Les recherches ont montré qu’il en existe un variant, plutôt fréquent chez les populations africaines, à hauteur de 2 %, alors qu’il est très rare chez les populations européennes, entre 0 et 1 %, explique Jenniffer Maroa qui a dirigé le service de génétique de l’Académie africaine des sciences début 2017.
« C’est à partir du moment où les Africains ont été intégrés aux études que ce variant a été découvert. À partir de cette découverte, on a développé un traitement qui cible la lipidémie, qui est un facteur de risque dans le cas des arrêts cardiaques et des infarctus », dit-elle.
Une plus grande diversité des bases de données utilisées pour les recherches médicales permet donc à terme de développer des médicaments plus efficaces. C’est l’un des enjeux de la médecine de précision et du programme gouvernemental All of Us lancé aux États-Unis en mai 2018.
« On veut faire en sorte que tout le monde soit pris en compte »
Kolbi Brown est le directeur chargé du recrutement des participants. L’objectif est de collecter régulièrement des échantillons de sang, d’urine et les données médicales de près d’un million d’Américains.
On essaie de faire en sorte que les gens comprennent qu’on est en train de construire ici aux États-Unis une infrastructure qui s’étend sur tout le territoire et qu’on a besoin pour cela du plus de diversité possible, pas seulement de diversité raciale, mais aussi de diversité socio-économique ou géographique, on veut faire en sorte que tout le monde soit pris en compte.
Aux États-Unis, les Noirs américains représentent 14 % de la population. Développer une médecine de précision est donc un enjeu de santé publique aussi bien pour eux que pour d’autres communautés comme les Hispaniques ou les Asiatiques.
Ce reportage a été réalisé grâce au soutien de la Health Journalism Grant du Centre européen pour le journalisme (European Journalism Center).
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