Reportage international

Arménie: un afflux massif d'entrepreneurs suite à «l'opération spéciale» en Ukraine

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En Arménie, et singulièrement dans la capitale Erevan, on entend de plus en plus souvent parler russe, dans la rue, dans les cafés et restaurants. Le pays accueille déjà des bases militaires russes, et les allers-retours de nombreux soldats de la force pacificatrice russe au Haut-Karabakh après la guerre de l'automne 2020. L'Arménie reçoit depuis quelques semaines une nouvelle population : des contestataires de ce que le Kremlin appelle « l'opération spéciale » en Ukraine, mais aussi des entrepreneurs qui s'installent à quelques heures de vol de la Russie pour continuer à exercer en échappant aux sanctions. Un chamboulement qui ne va pas sans tensions dans le pays, mais qui est perçu avant tout comme une opportunité.

Panorama d'Erevan, qui connaît un afflux d'entrepreneurs depuis quelques semaines.
Panorama d'Erevan, qui connaît un afflux d'entrepreneurs depuis quelques semaines. © Licence de documentation libre GNU
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Elles sont quatre, réunies autour d'un thé dans un restaurant du centre de la capitale arménienne. Ensemble, ces jeunes femmes viennent de fonder un collectif de locataires contre l'explosion soudaine des prix des loyers.

Mélinée Gazigian vient d’en faire l'amère expérience. La semaine dernière, son propriétaire lui a demandé de quitter son 65 mètres carrés à 300 euros en plein centre, et là...

Le gros problème justement, c'est que les prix ont tellement augmenté que certains propriétaires le disent directement, en fait : "Les Russes paient plus, donc moi je vais doubler ou tripler le prix. Soit vous vous alignez, soit vous partez. Vous payez actuellement 400 euros, donc soit vous payez 600 ou 800 euros, soit vous dégagez à la fin de la semaine ou du mois." Et c'est impossible, les salaires ici ne le permettent pas. Tout le monde est impacté actuellement

Un accompagnement organisé pour aider ces nouveaux arrivants

Beaucoup de ceux qui ont les moyens de payer un loyer élevé viennent aussi en Arménie pour relocaliser leur entreprise. Ils sont accueillis à bras ouverts.

À Repat Armenia, on a l'habitude d'appuyer les Arméniens de la diaspora. Mais depuis quelques semaines, l’accompagnement de cette association s'est élargi, comme l'explique Vartan Marashlyan, son directeur exécutif :

Nous essayons d'apporter une aide en termes d'information. Nous organisons par exemple des chaînes de discussions sur Telegram avec des experts de la relocalisation. Nous leur transmettons des listes de fournisseurs fiables, nous leur donnons des conseils juridiques. Tout ça se fait en urgence, puisqu'on parle de gens qui débarquent en Arménie, et ensuite se mettent à résoudre leurs problèmes : comment ouvrir un compte en banque, se trouver appartement, chercher des locaux pour travailler...

Une opportunité économique pour le pays

Une arrivée essentiellement d'entreprises spécialisées dans les hautes technologies. Mais toutes trouvent en Arménie un environnement favorable.

La plupart des Arméniens parlent russe, c’est facile de communiquer. Et ici en général, l'attitude vis-à-vis des Ukrainiens, des Biélorusses et des Russes est très positive. Alors qu'aujourd’hui, un Russe qui se rendrait aux États-Unis, au Canada ou en Europe, affrontera une certaine hostilité, même s’il n'aime pas le régime actuel dans son pays. Pour nous, c'est une situation gagnant-gagnant, parce que ces entreprises viennent ici avec leurs équipes et leurs clients, et ne prennent donc pas le travail des Arméniens. En plus, ils apportent une nouvelle énergie, de nouvelles idées, du sang neuf. C'est une vraie chance pour renforcer l'économie et rendre l'Arménie attractive aux non-Arméniens

Dans un pays inquiet que le conflit au Haut-Karabakh ne se rallume avec une haute intensité, toute possibilité de croissance économique reste avant tout perçue comme une opportunité.

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