Reportage international

À Shanghai, les sans-abri du confinement

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Les contaminations sont tombées sous la barre des 5 000 nouveaux cas cette semaine à Shanghai. La situation épidémique s’améliore, a confirmé vendredi 6 mai la Commission nationale de la santé. Cela après plus d’un mois de verrouillage strict de la ville, pendant lequel des dizaines de milliers de personnes se sont retrouvées confinées dehors. Témoignages ce matin des sans-abri de la résurgence Covid-19.

Des tentes de personnes obligées de se confiner dehors, dans un square de Shanghai.
Des tentes de personnes obligées de se confiner dehors, dans un square de Shanghai. © Weibo/Capture d'écran
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De notre correspondant, Stéphane Lagarde et de Louise May, du bureau de RFI à Pékin,

Il n’a pas mangé chaud pendant plus de deux semaines Zhu Yuanshang. Ce jeune vendeur de thé aux perles a été testé positif le 9 avril dernier. Envoyé en centre d’isolement collectif pour asymptomatiques, il est ressorti au bout de dix jours, mais là, impossible de rentrer chez lui.

On louait un appartement à plusieurs, mais le propriétaire nous a interdit d’y revenir. Il a expliqué que les lieux avaient besoin d’une désinfection approfondie suite aux nombreux cas de Covid. Le problème c’est qu’on ne peut pas quitter son quartier, il y a des policiers qui contrôlent. J’ai été dans deux centres pour sans-abri qui ne m’ont pas laissé entrer. Il paraît qu’il y en a d’autres, mais ils sont loin. Sans passe pour traverser les quartiers, vous ne pouvez pas y allez ! 

SDF du « zéro Covid » 

L’histoire de Monsieur Zhu est malheureusement partagée par d’autres. Comités de résidence qui refusent de laisser rentrer les anciens contaminés, livreurs persona non grata dans leur communauté – 20 000 d’entre eux ont continué de ravitailler les confinés, rapportait récemment la BBC. Au total ce sont des dizaines de milliers de personnes qui se sont retrouvées sans toit pendant la mise sous cloche des 26 millions d’habitants de la capitale économique chinoise. Résultat : des tentes ont poussé sur les trottoirs, avec souvent des marques de solidarité du voisinage, relève SixthTones.

Même si pour la plupart de ces SDF du « zéro Covid », il a fallu se débrouiller avec le strict minimum. « Depuis le 19 avril, je ne me suis pas brossé les dents ni lavé le visage », raconte Zhu Yuanshang. « Les toilettes publiques ont été scellées. En fait, on doit acheter des bouteilles d’eau minérale pour nous laver. Mais il est difficile de trouver de l’eau. C’est souvent en rupture de stock. Avant on vivait sous un pont, mais il y a eu des plaintes et on s’est installée dans un square », ajoute-t-il.  

Contrairement à monsieur Zhu, madame Zhao, âgée d’une trentaine d’années, n’a pas connu la tente, mais le salon de beauté où elle travaillait refuse de la voir revenir dans son dortoir depuis qu’elle a été envoyée en centre d’isolement. Elle a bien un parent, dit-elle, qui pourrait l’héberger à Shanghai. Sauf que là aussi le comité de résidence refuse de la laisser entrer.

Depuis sa sortie jeudi, elle est donc dans une école qui sert d’abri à ceux qui ne savent plus où aller. « Je ne sais pas si c’est sûr ou non d’être là », se demande-t-elle. « Certaines personnes qui sont sorties des centres d’isolement ont de nouveau attrapé le Covid. Il y a 20 lits dans la pièce où je me trouve, c’est une salle de classe. On nous fournit la nourriture. Ils ne veulent pas qu’on commande pour éviter les contacts. On nous dit aussi que nous devrons partir dans 7 jours, mais je ne sais pas où aller. » 

Centres de transfert  

Les centres de transfert comme celui de madame Zhao il y en a dans chaque quartier, personne n’est oublié, dit aujourd’hui le Shanghai Observer. Encore faut-il pouvoirs s’y rendre. Originaire du Hubei la province où est apparue la pandémie à l’hiver 2020, Zhu Yangshang rêve surtout d’un chez lui. « Je ne sais plus quoi espérer. Je veux juste que le verrouillage de la ville soit levé au plus vite pour retrouver un toit, même très modeste, ce sera mieux que dehors », souhaite-t-il.   

Et pour tous les ouvriers du bâtiment sans chantier, les agents de sécurité sans plus rien à surveiller, pour les femmes de ménage, les nounous et tous les travailleurs migrants qui ont perdu leur travail pendant le confinement à Shanghai, Omicron est synonyme de zéro revenus.  

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