Reportage international

Canada: les étudiants africains francophones victimes de discrimination pour leurs permis d'études

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Le sujet fait couler beaucoup d’encre au Canada ces derniers mois. Il y aurait des discriminations à l’immigration envers les demandeurs en provenance d’Afrique francophone. Un récent rapport fédéral évoque même de possibles « préjugés raciaux », ce qui provoque l’ire du gouvernement québécois.

Des étudiants devant l'université McGill de Montréal, au Québec, en octobre 2021.
Des étudiants devant l'université McGill de Montréal, au Québec, en octobre 2021. © AFP / DANIEL SLIM
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« Ce problème du taux élevé de refus des permis d’études est documenté depuis au moins une quinzaine d’années… » Martin Normand, de l’Association des collèges et universités de la francophonie canadienne, remarque depuis longtemps des discriminations dans la façon dont sont accordés les papiers d’immigration aux étudiants. « Il y a certains pays d’Afrique où 100% des permis d’études sont refusés. »

Pourtant, avant de faire leur demande de papiers, ces étudiants ont été acceptés par les universités. Ils ont prouvé qu’ils ont les moyens financiers de subvenir à leurs besoins une fois arrivés sur le sol canadien. Parfois, ils ont même reçu des bourses d’études. Mais rien n'y fait, explique l’avocate en immigration, maître Krishna Gagné : « Quelqu'un qui vient d'un pays qui est exempt de visa ou d’un pays occidental n’a pas besoin de démontrer le quart de ce qu’un Africain doit démontrer ».

Une discrimination systémique

« Les institutions post-secondaires ont levé le drapeau », indique Alexis Brunelle-Duceppe. Le député du Bloc québécois a talonné le gouvernement libéral pour se pencher sur le problème. Un Comité national composé d’élus de toutes allégeances politiques a interrogé pendant un mois en début d’année plus de 30 témoins, y compris le ministre de l’Immigration. Conclusion : différences systémiques, décisions souvent arbitraires… Les étudiants africains francophones semblent bel et bien discriminés lorsqu’ils demandent des permis d’études. « Au Cameroun francophone, on voit 88% de refus », signale Alexis Brunelle-Duceppe.

Selon le rapport, ces refus s’expliquent notamment par de possibles préjugés raciaux. Le président de la Ligue des Noirs du Québec, Max Stanley-Bazin, n’était pas surpris des résultats du rapport. Mais il espère maintenant voir des changements concrets dans l’appareil gouvernemental. « Il faudrait un filtre au départ pour que les personnes soient habilitées de manière naturelle à pouvoir prendre les bonnes décisions », suggère-t-il.

Une liste de 35 recommandations a été fournie, dont celle de créer un « ombudsman », un chien de garde indépendant pour réviser les dossiers. Le Comité demande aussi au ministère de revoir le recrutement et l’acceptation d’étudiants étrangers. « Les universités dépendent beaucoup des étudiants internationaux dans la structure de leurs revenus », remarque Martin Normand, de l’Association des collèges et universités de la francophonie canadienne. Sans compter qu’il s’agit de la main-d'œuvre de demain, alors que le Canada en manque dans plusieurs secteurs clés.

Le ministère de l'Immigration, de son côté, dit examiner les recommandations et s'engage à mettre en place un système non discriminatoire. Un rapport complémentaire sera publié plus tard cette année, portant spécifiquement sur le racisme au sein de ce ministère.

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