En Cisjordanie, une opération de «colonisation sauvage»
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En Cisjordanie, mercredi 20 juillet, lors d’une opération à l’initiative d’un mouvement nationaliste juif Nahala, des milliers de colons israéliens ont décidé de s’installer eux-mêmes sur des terres palestiniennes. Un rassemblement qui était prévu depuis des mois - en amont de la visite du président américain Joe Biden dans la région - et pour lequel l’organisation a récolté l’équivalent de plus de 1 400 000 dollars de dons. Pour ces colons, l’objectif était d’établir de nouveaux avant-postes, illégaux même au regard du droit israélien, car ils n’ont pas obtenu l’aval du gouvernement. Si tous ces avants-postes ont été évacués dans les jours suivants, la motivation des colons, elle, n’a pas cessé, et tous espèrent revenir sur les lieux. Au grand dam des Palestiniens, qui voient davantage de leurs terres confisquées, et la violence des colons s’intensifier.

De notre correspondante dans les Territoires palestiniens,
C’est une petite terre palestinienne, coincée entre la zone industrielle des colonies d’Ariel et de Barkan. Depuis la route, on voit des tentes multicolores, certaines avec un drapeau israélien sur le dessus. Pour les colons, nous sommes dans le nouvel avant-poste de Gofna. Noam a fait le déplacement depuis Kyriat Ono : « On commence avec des tentes, puis des caravanes. Car c’est écrit : le peuple d'Israël doit être répandu dans tout Israël. Nous sommes là pour dire que cette terre nous appartient, que nous allons vivre où l'on veut » explique-t-il.
Sur place, il y a des familles entières avec des enfants en bas âge, beaucoup de jeunes, sac à dos remplis, d’où dépassent des paquets de céréales, des casseroles, des sacs de couchage… Certains rassemblent des pierres, comme pour construire des maisons, protégés par la police et l’armée israélienne, malgré l’illégalité d’une telle initiative.
Ces nationalistes juifs chantent, dansent, et sous un tonnerre d’applaudissements, le député d’extrême droite Itamar Ben Gvir fait son entrée. Chef de file du parti suprémaciste juif Otzma Yehudit, ouvertement raciste, il rêve d’un « Grand Israël » englobant toutes les terres palestiniennes, la Jordanie, une partie de la Syrie et de l’Arabie saoudite, et estime que les 250 colonies existantes ne sont pas suffisantes.
Un discours qui séduit Matan, 28 ans, de la colonie de Peduel, à huit kilomètres d'ici : « Le gouvernement ne va pas assez loin, vraiment pas assez. Donc, notre but est de rester ici, pas une nuit ou deux, mais des semaines, des mois, jusqu’à ce que le gouvernement nous dise : ‘Ok, on est avec vous’ ». À l'objection qu'il y a des Palestiniens ici, qu'ils sont sur leur terre, il répond : « Qui dit que la terre leur appartient ? Qui dit ça ? Qu’ils disent que la terre leur appartient, ça ne veut pas dire que c’est vrai. Nous ne sommes pas au milieu d’un village arabe là, ce n’est pas notre but. Enfin, dans le futur, peut-être, mais là, notre but n'est pas de nous installer au milieu d’un village arabe. »
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Comme eux, des milliers de militants se sont donnés rendez-vous ce jour, du nord au sud de la Cisjordanie, pour y créer six nouveaux avants-postes illégaux, même au regard du droit israélien. Quelques militants de gauche essaient de les stopper, en vain. Dana Mills travaille pour l’organisation israélienne Peace Now : « On sait que les groupes d’intérêts des colons au gouvernement ont déjà obtenu ce qu’ils voulaient de la part de l’ancien gouvernement, donc ils volent de plus en plus de terres, en toute impunité ».
Sur la colline plus haut, il y a le village palestinien de Bruqin, où Ahmad, ingénieur, nous parle de la route en contrebas qu’il ne peut pas utiliser, réservée aux colons et des attaques, régulières, dans le village. « Et les oliviers, sur nos collines, ils les coupent tout le temps. Juste pour qu'on n'aille pas sur notre terre. »
Depuis le début de l’année, selon les défenseurs des droits de l'homme, au moins 71 Palestiniens ont été blessés par des colons et deux Palestiniens ont été tués. Environ 700 000 Israéliens vivent déjà dans des colonies en Cisjordanie occupée - soit 10% de la population juive israélienne - et ce, en violation totale du droit international.
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