À Gaza, la double pression sur les femmes palestiniennes
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Détérioration des conditions politiques, de la situation économique, blocus depuis 15 ans, vie sous occupation. Être une femme palestinienne vivant à Gaza, c'est déjà vivre avec toutes ses contraintes. À ceci s'ajoute une culture patriarcale, des guerres qui s'enchaînent. C’est pour elles que la pression est la plus forte.

Assise sur un banc sur le port de Gaza, Suheil Ashar regarde la mer avec ses enfants et son nouveau-né dans les bras. « Avec la guerre, les jours précédents ont été très difficiles. Je suis restée enfermée, j’avais peur. Donc j’ai voulu venir ici pour me relaxer un peu. Pour moi, la mer, c’est l’endroit où je me change les idées, où je respire, où je me sens bien », confie-t-elle.
En tant que mère, elle nous dit avoir une charge mentale supplémentaire à chaque fois que les bombardements reviennent sur l’enclave côtière. C’est elle la « responsable de famille », celle qui s’assure qu’il y a assez à manger, que les enfants n’ont pas peur. « À chaque bombardement, je leur parlais d’une voix plus douce, je chantais ou je faisais des petits jeux sonores pour qu’ils n’aient pas peur du son des explosions », raconte-t-elle encore.
À Gaza, si les guerres affectent psychologiquement toute la population, les femmes sont celles qui en souffrent de manière disproportionnée. Ghada Khalifa, 62 ans, a vu sa maison réduite à l’état de gravats, et sa principale source d’argent – les trois petites échoppes qu’elle louait au rez-de-chaussée – partir en fumée. « Je suis une femme âgée, j’élève mes fils, qui sont jeunes et ce sont des orphelins, j’ai déjà perdu mon mari. C’est moi qui les nourris. Maintenant, on est littéralement déplacés, nous n’avons plus de maison, nous sommes à la rue. Je voudrais juste une maison où nous pourrions être ensemble, quelque chose, implore-t-elle. Je n’ai pas pu me doucher depuis plusieurs jours, j’ai honte d’utiliser la salle de bain hors de chez moi. »
Ses yeux s’humidifient. Elle parle du manque d’intimité, des efforts qu’elle fait pour appeler des proches et trouver où se reloger. Elle remercie Dieu de ne pas avoir été blessée. Car les blessures aussi ont des répercussions plus lourdes chez les femmes, explique Tamam Mohsen, directrice de plaidoyer pour le centre des droits de l’homme al Mezan :
« On parle de société patriarcale ici, c’est typiquement ça : je ne vois pas la société palestinienne comme égalitaire. Alors quand des femmes sont blessées, cela veut dire qu’elles ne peuvent plus assurer les rôles sociaux, les rôles de genre que l’on attend d’elles. Et c’est plus difficile aussi quand il s’agit de trouver un mari, de fonder une famille. Nous n’avons pas de chiffres précis, car ce n’est pas quelque chose sur lequel il y a des statistiques, mais nous pouvons l’imaginer : on vit dans cette société et on le voit. »
Parfois, l’impact est indirect à Gaza, précise Tamam Mohsen. Plus la situation humanitaire se détériore, et plus les violences domestiques sont en hausse.
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